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De plus en plus de millionnaires dans le monde
Henri Beauregard – À l’échelle mondiale, au cours de deux ou trois dernières décennies, en excluant la crise financière des subprimes en 2008, nous avons assisté à une très forte flambée des prix dans l’immobilier, à une bonne performance des marchés financiers et plusieurs pays, dits émergents (Chine, Corée du Sud, Taïwan, etc.), ont connu des taux de croissance économique remarquables. Globalement, tout cela a favorisé l’arrivée de nouveaux millionnaires.
Les inégalités économiques
On peut estimer les inégalités économiques en comparant ce qui est gagné par des individus, soit leurs revenus respectifs, ou encore en évaluant ce qu’ils possèdent, c’est-à-dire leurs patrimoines.
Chaque année, le Crédit suisse, une filiale du groupe UBC-AG, la plus grande banque privée mondiale de gestion de fortunes, publie un rapport global sur la richesse dans le monde1. On y dévoile, entre autres, l’évolution du nombre de millionnaires sur la planète (tableau 1). Voir : Un millionnaire selon le Crédit suisse.
Sans surprise, en 2023, c’est encore aux États-Unis que l’on retrouve le plus grand nombre de millionnaires : près de 22 millions d’individus. Au deuxième rang, la Chine avec environ 6 millions de millionnaires, un pays qui est toutefois quatre fois plus peuplé que le premier. Et au troisième rang, le Royaume-Uni avec trois millions de millionnaires. Avec près deux millions de millionnaires, sept fois plus qu’en 2000, le Canada occupe le septième rang – tableau 1.
La multiplication du nombre de millionnaires dans certains pays est particulièrement spectaculaire : par 154 en Chine; 24 en Inde; 22,5 en Russie; 17,1 en Australie et 14 en Corée du Sud.
La concentration de la richesse
En 2023, dans l’échantillon2 du Crédit suisse, 58 millions de personnes détenaient un patrimoine net supérieur à un million de dollars américains3. La figure 1 illustre la répartition de la richesse mondiale.
- À lui seul, le groupe des plus fortunés, 1,5 % de la population, détient 213 800 milliards de dollars, soit près de la moitié (47,5 %) du patrimoine mondial privé.
- À l’autre extrême, au bas de la pyramide, environ 1,5 milliard d’individus, 39,5 % de la population, ne détiennent que 0,5 % du patrimoine mondial (2 400 milliards de dollars).
- Le deuxième groupe le plus riche, les personnes détenant un actif net entre 100 000 $ et un million de dollars, soit 16,3 de l’échantillon total, possèdent 39,4 % du patrimoine mondial (177 200 milliards de dollars).
- Enfin, les individus avec un actif net entre 10 000 $ et 100 000 $, 42,7 % de la population totale, disposent de 12,6 % du patrimoine mondial (56 500 milliards de dollars).
Les super riches, la fortune des milliardaires
Au sein des millionnaires, les milliardaires se distinguent : ils sont peu nombreux et très riches, pardonnez la lapalissade.
On dénombre 14 individus avec un patrimoine supérieur à 100 milliards de dollars qui rassemblent une fortune de 1 973 milliards de dollars; suivis de 12 individus avec une fortune entre 50 et 100 milliards de dollars qui disposent d’une richesse de 899 milliards de dollars; enfin, le troisième regroupement des milliardaires, avec un patrimoine supérieur à un milliard et inférieur à 50 milliards de dollars, réunit 2 638 personnes avec une fortune de 11 058 milliards de dollars – figure 2.
Les mécanismes de l’accumulation de la richesse
Revenu et patrimoine sont distincts mais intimement interdépendants. Un patrimoine, ce sont toutes les richesses que l’on réussit à engranger en mettant de côté une partie de son revenu, son épargne, que l’on n’a pas consommé. Cela va de soi que plus le revenu d’un individu est élevé, plus il lui est aisé d’épargner, et ce, même s’il consomme beaucoup en termes absolus.
Dès lors, pour les plus privilégiés en termes de revenus, on assiste à la construction d’un cercle vertueux à leur avantage : plus d’épargne engendre plus de patrimoine qui se traduit ensuite par plus de revenus, etc. En effet, un patrimoine, même s’il constitue un stock, n’est pas statique pour autant et il engendre lui-même des revenus qui s’additionnent. Pensons par exemple aux biens immobiliers dont les prix augmentent, aux hausses boursières, etc.
Ainsi, les inégalités de patrimoine alimentent des inégalités de revenus qui à leur tour génèrent de l’épargne que l’on peut « investir » et contribuer à accroître les inégalités de fortunes puisqu’un grand nombre de personnes sont exclus de cercle vertueux faute de revenus assez élevés.
Taxer les milliardaires
À la réunion des pays du G20, les 25 et 26 juillet 2024 à Rio, l’économiste français Gabriel Zucman, spécialiste de fiscalité internationale, a proposé dans un rapport une taxe de 2 % aux riches détenteurs d’une fortune de plus de 100 millions de dollars. Selon ses estimations, une telle taxe rapporterait des recettes fiscales entre 108 et 135 milliards de dollars.
Pour l’instant, particulièrement avec le nouvel occupant du bureau ovale à la maison blanche, nous sommes loin d’une entente internationale entre les États membres du G20. Mais qui aurait imaginé il y a à peine une décennie qu’on arriverait à un accord pour une taxation minimale des multinationales ? Le pire n’est pas une fatalité !
Un millionnaire selon le Crédit suisse
Le Crédit suisse considère qu’une personne est millionnaire si la valeur de son patrimoine net est égale ou supérieure à un million de dollars américains. Cela représente la valeur de tous les actifs financiers et non financiers détenus par un individu moins l’ensemble de ses dettes. En 2023, un million de dollars américains équivalait à 1 349 700 dollars canadiens.
1. UBS, Global Wealth Report 2024, Crafted wealth intelligence.
2. L’échantillon couvre 56 pays qui représentent plus de 95 % de la richesse mondiale totale.
3. Toutes les données en dollars dans cet article sont en dollars américains.