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Debussy – Images Oubliées avec Stéphane Tétreault et Olivier Hébert-Bouchard
Carole Trempe – Debussy – Images Oubliées a ouvert la saison 2024-2025 de Diffusions Amal’gamme le samedi 14 septembre 2024 à la salle de spectacle Saint-François-Xavier de Prévost, dans le cadre de la série Grands Classiques. Au violoncelle, Stéphane Tétreault; au piano, Olivier Hébert-Bouchard.
On peut affirmer que Stéphane Tétreault est parmi nos artistes chouchous. Sur les planches de cette même salle à l’âge de 16 ans, ce petit génie violoncelliste – toujours aussi prodigieux- a depuis, beaucoup maturé. Il est devenu cet émissaire qui nous rappelle de quoi sont faits les plus grands maîtres. Par son immense talent et son humilité au service de la musique, il nous convie ailleurs, là où il cultive le son dépassant largement les merveilleuses qualités de son instrument. Il joue sur un violoncelle Stradivarius Countess et Stainlein, Ex-Paganini de 1707 prêté par Sophie Desmarais.
Pour sceller une alliance hors pair, un formidable pianiste s’insère, Olivier Hébert-Bouchard. Un musicien d’exception qui traduit admirablement la hauteur de la difficulté des pièces interprétées, en plus d’être un phénoménal arrangeur.
Le récital est bien orchestré suivant la chronologie de la carrière artistique de Debussy. Nos deux protagonistes sont des amoureux fous de ce compositeur qu’ils connaissent à fond et qu’ils nous font redécouvrir. Redécouvrir par un programme de transcriptions d’œuvres originellement créées pour piano ou pour deux pianos de Debussy, pour violoncelle et piano. Les œuvres sont arrangées avec grand soin pour les deux instruments. Cela témoigne de l’amour indéfectible pour la matière de base.
Le charme opère, l’effet est fantastique
Images oubliées, L.87 (1894), œuvre lente, mélancolique et douce qui campe la soirée. Deux arabesques, L.74 (1890-1891), touchantes et humoristiques qui célébraient les formes de la nature faites par les artistes Art Nouveau de l’époque. Debussy s’oppose au romantisme, il est moderne et il veut tout renverser. Il mélange modes et couleurs avec de nombreux changements de tonalité.
Tarantelle styrienne, L.69 (1890), qui un peu plus tard portera le nom de Danse. C’est un scherzo vif. Techniquement difficile. On entend la joie personnelle du compositeur.
Images oubliées, L.87 (1894), 11. Souvenir du Louvre inspirée de l’œuvre d’Antoine Watteau, 1717 l’île de Cythère. Ce tableau est localisé au Musée du Louvre à Paris. Il représente les plaisirs amoureux richement traduits par le compositeur.
L’Isle joyeuse, L106 (1904), œuvre vivace et bonheur explosif. Cette pièce a été écrite dans la période de gloire de Debussy où il reçoit de grands honneurs.
En deuxième partie du concert, Prélude de la damoiselle élue, L.69b (1906), cette œuvre d’un magnifique lyrisme raconte l’histoire d’une jeune fille au Ciel qui se lamente sur l’absence de son amant alors que sur Terre, l’amant croit sentir sa présence. Cette œuvre s’est méritée le Prix de Rome, l’un des plus prestigieux prix à la composition musicale. À l’époque, le récipiendaire se méritait un séjour en résidence à l’Académie française de Rome pour trois ans. De nos jours on remet une somme d’argent.
Images oubliées, L.87 (1894), « Nous n’irons plus au bois », pièce très légère qui démontre le sens de l’humour de Debussy. Fait anodin : à l’époque, Debussy était critique de musique et il signait ses textes sous le pseudonyme de Monsieur Croche. Quant à la pièce elle-même, il semble que bien qu’elle soit une ronde enfantine créée par Madame de Pompadour en 1753, elle aurait un sens caché pour dénoncer l’interdiction des maisons de prostitution pendant le règne de Louis XV.
Golliwogg’s Cakewalk, tiré du Children’s Corner, L.119 (1906-1908), Le Coin des Enfants dont le titre en anglais est un clin d’œil à la Nanny qui prenait soin de sa fille adorée Claude-Emma. Cette pièce rigolote requiert cependant une excellente maîtrise technique.
Petite suite, L.71a (1888-89), écrite pour piano à 4 mains, Debussy a choisi cette pièce pour enseigner le piano à sa fille Claude-Emma. Après la mort de son père, l’enfant aurait continué ses cours avec Gabriel Fauré.
Élégie, L.138 (1915), est une page inspirée par la guerre qui relate le désespoir du compositeur aux prises avec sa souffrance physique et morale issue d’une maladie mortelle confondue avec celles de la France, sa patrie tant aimée, meurtrie par cette guerre. Une sorte de musique sans espoir.
Sonate pour violoncelle et piano, L.135 (1915), la seule œuvre de la soirée interprétée dans sa version originelle représente le summum de la maîtrise des deux instruments par le compositeur. Cette pièce regorge de couleurs et de textures. D’une très haute difficulté sur le plan technique, elle constitue une vitrine extraordinaire pour faire valoir nos deux talentueux musiciens.
Tout au long de ce récital, nous avons cueilli le fruit d’une démarche artistique poétique par un duo de musiciens complices, efficaces et très éloquents. Riche de cette si belle expérience, notre âme s’est échappée pour nicher dans l’infinitude beauté de la musique.