Nos aînés, notre richesse

Sonia Bélanger, ministre responsable des Aînés et ministre déléguée à la Santé – photo courtoisie
Léa Charbonneau
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Entretien avec Sonia Bélanger, ministre responsable des Aînés et ministre déléguée à la Santé

Léa Charbonneau – Qu’importe l’année, qu’importe notre partisanerie, nos aînés sont toujours au cœur de nos préoccupations au Québec. Bien que les enjeux puissent varier, ils sont d’autant plus importants maintenant avec le vieillissement de la population. Le mois dernier, lors d’un entretien avec Sonia Bélanger, ministre responsable des Aînés et déléguée à la Santé, nous avons discuté de ces enjeux ainsi que de son parcours politique.

Parcours et adaptation

« Pour moi, la politique était un cheminement naturel dans ma carrière », nous confie la ministre. Elle est arrivée en poste avec un solide bagage dans le domaine de la santé. Ayant été présidente-directrice générale du Centre-sud-de-l’île-de-Montréal pendant plusieurs années, madame Bélanger était habituée aux rouages parfois coriaces du domaine de la santé et de la gestion. L’expérience dans ce domaine et l’expérience politique sont néanmoins bien différentes : « Je connaissais le monde de la gestion et des soins, mais j’ai dû découvrir plein d’autres choses. J’ai rencontré plusieurs acteurs locaux, organismes, etc. », nous explique-t-elle. Devenue ministre quelque temps après avoir été élue députée de Prévost, elle a dû jongler avec plusieurs aspects différents nécessitant la collaboration de plusieurs ministères : « Au départ, ce que j’ai trouvé le plus difficile était de travailler avec plusieurs ministres », dit madame Bélanger. Toutefois, elle réitère que le travail d’équipe se passe très bien : « J’ai la chance d’avoir des collègues qui me soutiennent », souligne-t-elle.

Jusqu’à présent

Au cours des six dernières années, plusieurs choses ont évolué au Québec pour nos aînés. L’un des changements les plus importants fut le passage des CHSLD aux Maisons des aînés (MDA). Avec fierté, Sonia Bélanger nous dit : « Nous sommes maintenant rendus à 30 MDA au Québec, dont cinq dans les Laurentides. » Évidemment, réjouissons-nous de ce progrès, mais nous ne pouvons pas minimiser le besoin criant qui demeure dans notre région. Madame Bélanger en est consciente, mais elle a plusieurs projets en cours : « Nous avons réussi à ajuster les places, mais nous avons plusieurs autres cibles au cours des prochaines années. » Mettre sur pied une MDA ne se fait pas en un claquement de doigts. D’abord, plusieurs critères entrent en compte dans le processus de sélection : « Il y a trois étapes de sélection », nous dit la ministre. En bref, la première consiste en l’évaluation de la densité de la population sur un territoire donné ainsi que l’âge de cette population. Ensuite, on examine les ressources disponibles sur le territoire. Enfin, il reste à déterminer le lieu de construction : « Une autre belle chose des MDA est qu’elles s’insèrent dans les quartiers. Elles font partie de la communauté », ajoute-t-elle. Cette mesure de construction s’inscrit dans la nouvelle philosophie apportée aux MDA : « Il faut savoir qu’il y a plusieurs formations lorsqu’on veut travailler dans une MDA. On veut s’assurer que les employés désirent vraiment travailler dans ce milieu », précise-t-elle. Comme mentionné précédemment, plusieurs autres changements ont été apportés, dont l’un dont elle est particulièrement fière : la transformation technologique dans ces milieux. Maintenant, tout est numérisé, ce qui semble être plus rapide et efficace. Bien sûr, certains professionnels sont habitués depuis des lustres à la méthode papier : « Il y a un programme de jumelage au sein des institutions. C’était vraiment beau à voir l’entraide intergénérationnelle », s’enthousiasme la ministre.

Du pain sur la planche

« On ne peut pas calculer uniquement en termes de places », mentionne madame Bélanger. Il est indéniable que les enjeux entourant le vieillissement de la population sont très diversifiés. Il n’existe pas de solution miracle. Le cheval de bataille de la ministre est le soutien à domicile. Elle nous explique que « Quand on demande à la population ce qu’elle veut, c’est rester chez elle. » Pour répondre à ce besoin, elle mise sur trois fronts d’organismes. Le premier est déjà bien connu des Québécois : les soins à domicile des CLSC. Ceux-ci s’occupent des médicaments et des soins généraux. Le deuxième groupe de son plan est constitué des entreprises d’économie sociale à domicile. Un peu comme des coopératives, ces groupes fournissent divers services allant du ménage à domicile aux travaux de construction légers. Enfin, le dernier groupe concerne les Municipalités : les tables de concertation des aînés. Elles contribuent à l’aspect social et à la viabilité des aînés dans leur quartier; elles peuvent également gérer conjointement avec la Ville les installations nécessaires pour faciliter la vie des aînés. Déléguer cette tâche à divers organismes est un travail de grande envergure qui ne se fait pas en criant Bingo : « Un travail de collaboration sera nécessaire pour ce genre de mesure », nous rassure la ministre. Ce mois-ci, la ministre annoncera un projet auquel elle a beaucoup travaillé : une politique nationale de soins à domicile. Il sera alors important de rester à l’affût pour voir comment elle mettra en œuvre sa vision et établira ces collaborations.

La maltraitance : le grand défi

Il y a quelques semaines, des cas de maltraitance ont été signalés dans des CHSLD de l’est de l’île et de la Rive-Sud. Face à ces tristes nouvelles, la ministre avait annoncé que les employés insatisfaits de leur travail devaient partir. Elle réitère cette position : « Au Québec, nous sommes les seuls dans le monde à avoir une loi obligeant la divulgation de tout type de maltraitance, malgré l’ordre professionnel. » Elle souligne que c’est une avancée majeure pour le système. Une autre mesure importante dans la lutte contre les violences envers les personnes âgées est la visite imprévue dans les établissements publics et privés. Cela signifie que même si l’établissement n’est pas public, il peut être placé sous tutelle par une administration provisoire jusqu’à ce que le problème interne soit résolu. C’est d’ailleurs le cas de trois établissements des CHSLD d’Argyle. Bien que des politiques strictes aient été mises en place dans les établissements et envers les professionnels, il est important de se pencher sur la situation dans les domiciles. Considérant que le gouvernement veut bonifier les soins à domicile, il ne faut pas négliger que la maltraitance envers nos aînés peut parfois être perpétrée par les proches. Il faudra donc envisager l’étendue de ces politiques ou trouver de nouvelles façons de lutter contre la violence envers nos aînés, y compris dans leur propre domicile.

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