Sur une piste de ski

Jacinthe Laliberté
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Gérard Proulx, de Sainte-Anne-des-Lacs, décède

Jacinthe Laliberté – Gérard Proulx, un Annelacois, est décédé sur l’une des pistes de ski des Sommets (Mont Saint-Sauveur) versant Avila le 16 janvier dernier. Un accident qui aurait dû ou pu être évité selon les membres de la famille.

Un gars passionné

Une journée noire pour ce skieur chevronné qui devait célébrer ses 79 ans le 8 février. Sa réputation en matière de sport de glisse n’était plus à refaire. Gérard Proulx a parcouru le monde pour satisfaire sa passion. De l’Europe au Colorado sans oublier les différentes stations de ski de l’Ouest canadien, aucune pente ne l’arrêtait. Le ski, c’était sa vie, et ce, depuis les années 1960.

Depuis plusieurs années, détenteur d’une passe de la station Les Sommets, il skiait en compagnie de son épouse et d’un groupe d’amis presque tous les matins.

La prudence avant tout

Prudence ! Prudence ! était le leitmotiv de Gérard Proulx. Il ne skiait que lorsque les conditions s’y prêtaient. « Mon père a toujours été un skieur très prudent. » Catégorique, Sylvain Proulx, le fils du défunt, certifie que, pour son père, la sécurité importait plus que tout. Très souvent, il préférait trop que pas assez. Au fil des ans, Gérard a transmis les règles de sécurité qui lui importaient à tous ceux qu’il a initiés au ski. Malheureusement, cette prudence n’a pas suffi à éviter l’inévitable à ce chef de file.

Le saut de la mort

Lors de cette journée fatidique, un canon à neige fabriquait de la neige artificielle en formant de grosses bosses et en projetant le fameux nuage blanc appelé par les skieurs « le jour blanc », c’est-à-dire le moment où il est impossible de faire la différence entre le ciel et la neige.

Son fils, Sylvain Proulx, revient sur les moments précédant l’accident : « Quelque 40 minutes avant l’accident fatal, un autre skieur d’une soixantaine d’années, lui aussi, très aguerri, a fait un saut, non prévu, de 20 pieds dans les airs à la hauteur de la montagne de neige artificielle non balisée, se blessant sérieusement ».

N’ayant pas été avisé de l’accident et ne voyant aucune affiche indiquant la dangerosité de la piste, Gérard Proulx s’est engagé, seul, en toute confiance vers le bas de la montagne pendant que son épouse attendait leur groupe d’amis au sommet du télésiège.

Gérard n’a pas pu, tout comme le skieur précédent, éviter ce saut mortel. Moins chanceux, il est décédé sur le coup aux abords de la piste.

Immédiatement après le premier accident, le blessé a imploré les patrouilleurs de fermer la piste pour éviter un autre accident, mais pour une raison inconnue, cette demande n’a pas été entendue.
Selon les enquêteurs qui ont rencontré les membres de la famille, les marques de ski indiquaient que les deux accidents s’étaient produits au même endroit.

La piste ne fut fermée qu’après le décès de Gérard Proulx.

Un accident qui aurait pu ou dû être évité

D’après le fils de monsieur Proulx, cet accident aurait dû ou pu être évité. La piste, la Laurentides, comportait un élément de dangerosité : des canons à neige en fonction. Cependant, rien ne l’indiquait.

Sylvain questionne l’absence d’affiches avec icônes indiquant qu’il y avait un danger tangible sur cette piste. Cet avertissement visuel aurait, incontestablement, dissuadé son père de s’y aventurer. À tout le moins, le fameux saut non visible aurait dû préalablement être signalé à l’aide de grandes perches en bambou ou des skis entrecroisés.

Pour l’instant, il y a une enquête du coroner qui veut, selon les dires de Sylvain Proulx, publier très rapidement l’analyse et les résultats pour que cet accident ne soit pas oublié. Le but de cette enquête est, notamment, de revoir la façon de fabriquer la neige artificielle à travers le Québec.

Christian Dufour, le directeur marketing du groupe Les Sommets, a offert ses condoléances aux proches du skieur décédé. Par le biais d’un communiqué, il s’est dit très attristé par la situation et a indiqué qu’il collabore avec la Sûreté du Québec dans la poursuite de l’enquête.

Création de la fondation Ski-Logique

Monsieur Proulx attachait beaucoup d’importance au programme Ski-Études de l’école secondaire Augustin-Norbert-Morin, sise à Sainte-Adèle. D’ailleurs, il était de toutes les campagnes de financement, et ce, depuis plusieurs années.

« Pour honorer sa mémoire, son implication auprès des jeunes et surtout pour que son nom soit associé à la sécurité, nous avons créé Ski-Logique, qui est une annexe de la fondation de l’école Augustin-Norbert-Morin. Nous espérons ainsi sensibiliser, particulièrement les jeunes, à la sécurité », commente Sylvain Proulx.

Il tient à préciser qu’il ne cible pas nécessairement la sécurité, mais la logique qui régule cette notion. Pour bien comprendre la raison d’être de Ski-Logique, Sylvain donne l’exemple suivant : « Dans un premier temps, il est primordial de savoir quoi faire en cas d’accident, d’autant plus que, de nos jours, les jeunes visionnent, en rafale, sur les différentes plateformes comme Insta-gram, des vidéos de personnes exécutant des sauts dignes de gymnastes professionnels. Or, rendus devant les sauts fabriqués pour de tels exploits qui se dressent, ils n’hésitent pas un instant ». Là est le danger, là survient la logique.
Grâce à cette annexe appelée Ski-Logique, les initiateurs de ce projet bénéficieront de moyens concrets pour une meilleure transmission de l’information.

Que retenir de cet évènement ?

Un débat concernant la sécurité lors de la pratique d’un sport pourrait certainement être utile. Sylvain complète sa pensée ainsi : « Revenons à l’exemple des immenses sauts installés dans les parcs à neige. Il ne faut pas les enlever, mais plutôt sensibiliser à la complexité de ces sauts. En même temps, il faut exhorter les jeunes à skier d’une façon logique, donc sécuritaire ».

Pour Sylvain, Ski-Logique donnera la possibilité de poursuivre la passion de son père. Il ne désire pas que, par cet évènement, le ski soit perçu comme un sport dangereux. Derrière toute pratique de sport, il y a une logique pour tous, autant pour les adeptes de tout âge que les patrouilleurs et les directeurs de stations de ski.

« Il ne faut pas que cet accident soit vain. Mon père est décédé sans s’en rendre compte à la suite d’un saut en hauteur, et ce, sans le vouloir, skiant ainsi jusqu’au ciel », de conclure Sylvain Proulx.
Un don peut être fait, à la mémoire de Gérard Proulx, pour la fondation Sports-études à l’adresse suivante : https://skietudes-org.square.site ou pour tout don par chèque, au nom de La Fondation Sports-Études A. N. Morin.

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