Défi citoyen

Le lundi 30 octobre 2023, la soirée de lancement du projet Réduisons nos déchets s’est déroulée à la salle Saint-François-Xavier sous la direction d’Incita, la coop-conseil zéro déchet. Ses responsables, Aurore Courtieux-Boinot et Mélissa de La Fontaine, ont présidé cette soirée en compagnie de Joey Leckman, le conseiller municipal à la Ville de Prévost et le président chez la coop Tricentris, et de plusieurs familles participantes - photo: Nicolas Michaud

Zéro déchet pour douze foyers Prévostois

Nicolas MichaudC’est à partir de la règle des 5 R — Repenser, Refuser, Réduire, Réutiliser (ou réparer), Revaloriser (recycler ou composter) —, que 12 familles prévostoises s’aventurent sur le chemin du Défi citoyen zéro déchet, et ce, grâce à un partenariat entre la Ville de Prévost et la coop-conseil Incita.

Pour une période de six mois, de novembre 2023 à avril 2024, les foyers participants reçoivent un accompagnement personnalisé et sur mesure par l’équipe d’expertes d’Incita. Afin de les guider et de les outiller vers des transitions sans déchet dans une optique de pérennité, la coopérative leur offre d’abord des services-conseils environnementaux en formulant des diagnostics, des plans d’action et des stratégies de sensibilisation ou de mobilisation.

Ensuite, cette organisation écologiste leur propose des animations, soit des conférences, des ateliers de discussions ou de fabrication, et des formations exclusives sur des thématiques liées au zéro déchet. La coopérative Incita fournit donc un support continu aux familles, que ce soit par courriel, par téléphone, par des rencontres individuelles ou par leur plateforme d’apprentissage autonome en ligne.

L’objectif des ménages participants ? Mesurer la réduction de leur production de matières résiduelles au moyen de pesées régulières, repenser leur manière de consommer et trouver d’autres solutions pour effectuer une transition écologique. Plusieurs de ces familles ont d’ailleurs accepté de partager leur expérience avec le Journal à des fins informationnelles.

Pourquoi ?

Mélissa de La Fontaine, qui arbore fièrement une jupe fabriquée à partir d’un vieux parapluie, est une conseillère-animatrice sur le mode de vie zéro déchet et la transition écologique – photo: Nicolas Michaud

Plusieurs raisons pouvaient inciter ces foyers à participer au défi. Pour Gabrielle et sa famille, cette affaire arrivait à point nommé : « On avait déjà un intérêt, à la maison, pour le zéro déchet ou pour essayer de réduire les déchets, c’était une façon de nous aider à en faire un petit peu plus ». Il en est de même pour la famille de Valérie* dont les cinq membres prenaient déjà l’environnement à cœur et tenaient à « aller encore un peu plus loin ».

Pour Ginette, qui avait déjà commencé à consommer autrement, une simple discussion avec ses petits-enfants l’a convaincue de se lancer dans l’aventure avec eux. Pour Julia, qui s’était déjà abonnée à Incita sur les réseaux sociaux, c’est en lisant le journal qu’elle a pris connaissance des appels à candidatures pour ce défi qui lui trottait dans la tête depuis un bon moment : « J’ai sauté sur l’occasion, c’est quelque chose que, moi, j’essayais de faire un peu par moi-même; alors, avoir un coaching, c’était vraiment une belle occasion ». Quant à Christiane et son ménage, ceux-ci étaient de passage dans les bureaux de la Ville lorsqu’ils sont tombés sur la chargée de projet au Service de l’environnement qui leur a fait part de ce nouveau projet qui les a immédiatement séduits.

Les changements les plus faciles…

Aurore Courtieux-Boinot, qui est titulaire d’une maîtrise en gestion de l’environnement de l’Université de Sherbrooke, est une conseillère en économie circulaire et en gestion des matières résiduelles– photo: Nicolas Michaud

Depuis le début du défi, certaines habitudes sont plus faciles à adopter ou à changer que d’autres. Chez Gabrielle, cela s’est essentiellement traduit par « une augmentation de la fréquence d’utilisation des couches lavables » puis par « l’installation de plus de zones de poubelles ou de sacs de tri dans la maison, pas juste dans la cuisine, mais dans les salles de bain aussi » ainsi que par « l’apprentissage de recettes pour la fabrication des produits ménagers et autres produits domestiques à faire soi-même ».

À propos de la famille assez écophile de Valérie*, ce défi leur sert essentiellement à confirmer l’étendue de leurs connaissances sur le sujet tout en validant le caractère écologique de leurs gestes et modes de vie actuels. Néanmoins, la coop Incita a tout de même réussi à leur fournir une aide précieuse pour faciliter le triage des plastiques numéro 6 ou PS — PolyStyrène Expansé.

Chez Ginette, cette transformation s’est surtout opérée au niveau cérébral : « J’étais maintenant beaucoup plus consciente de ce que je pouvais recycler, de ce que je pouvais mettre au compost [de] comment utiliser les ressources qu’on a, puis les utiliser au maximum. » Cette citoyenne rapporte également une évolution de son approche consumériste : « Quand je veux acheter quelque chose, je me dis maintenant : est-ce que je peux aller sur Marketplace ? Est-ce que je peux l’échanger avec quelqu’un ? C’est un réflexe que je n’avais pas avant. »

Pour Christiane, ses changements les plus simples sont de nature sociale : « Ça m’amène à découvrir des endroits en vrac ou d’autres endroits que je ne connais pas […] ça permet le partage, l’échange de choses et de lieux qu’on connaît, et de façons de faire aussi parce que, quand tu restes tout seul dans ton petit coin, tu développes des choses, mais mettons que tu accélères ton processus de transition écologique. » Cette opinion est également partagée par Julia qui témoigne d’avoir fortement apprécié son magasinage en vrac chez La Station Vrac à Saint-Jérôme ou chez Terre à soi à Prévost : « J’ai vraiment aimé mon expérience, c’est un plaisir d’aller faire mon épicerie ».

… aux changements les plus difficiles

Du côté de la famille de Gabrielle, si on a pris le temps de prendre en note les recettes de fabrication pour les produits domestiques, le plus dur « est de se rappeler aussi de ne pas avoir le réflexe d’aller acheter, à la pharmacie ou à l’épicerie, les produits dont a besoin, de toujours réfléchir et se dire qu’on pourrait à la place les faire soi-même ». Pour Ginette, ce qui est « difficile, c’est l’achat des produits locaux qui sont toujours plus dispendieux que ceux vendus dans une bannière ». En ce contexte inflationniste et récessionniste, le facteur économique demeure également pertinent chez Valérie qui affirme que « le vrac est plus cher que ce qui est emballé ». Cette dernière avance également que c’est l’accessibilité aux commerces facilitant le zéro déchet qui demeure fort problématique dans les Laurentides. Ces commerces qui favorisent le zéro déchet seraient, selon elle, en nombre insuffisant dans les régions éloignées des grands centres urbains.

Enfin, pour la majorité des foyers participants, ces derniers ont confié que la prochaine étape de leur mode de vie plus vert serait d’avoir systématiquement le réflexe d’apporter leurs contenants réutilisables au cours de leurs visites à l’épicerie ou au restaurant.

Un Noël vert et une nouvelle année encore plus verte

Si le temps des Fêtes est souvent considéré comme étant un temps de réjouissances, c’était aussi un défi de taille pour ces familles désireuses de réduire leur empreinte environnementale. Alors qu’elles s’en sortaient assez bien contre le gaspillage alimentaire et les mets emballés en préparant eux-mêmes leurs repas, c’est surtout lorsqu’il s’agit d’offrir des cadeaux aux jeunes enfants que les choses se compliquent. Comme l’exprime Julia, « pour les cadeaux, ça demande plus de créativité et de temps; finalement, on se rend compte que c’est facile d’acheter n’importe quel jeu versus d’offrir du temps en cadeau, une activité ». D’un autre côté, pour Christiane, dont les enfants sont maintenant grands, « on priorise de se faire des bons repas plutôt que de se faire des cadeaux ». Quant à Valérie*, sa famille utilisait déjà des emballages en tissus, mais cette expérience les a quand même motivés à influencer un peu leur entourage à faire de même.

Le mot de la fin

Le message est assez unanime : l’ensemble des familles contactées par le Journal encouragent vivement tout le monde à s’informer, à embarquer dans l’aventure du zéro déchet, voire à s’inscrire chez Incita si une autre cohorte est prochainement prévue dans la région.
Quant aux personnes plus âgées qui seraient plus réticentes à embrasser un mode de vie sans déchet, Ginette leur répond : « Il faut doser, changer ses habitudes […] Moi, j’ai 70 ans, et il y a beaucoup de gens de mon âge qui sont ancrés dans leurs habitudes. C’est difficile, c’est vrai que c’est pas facile de changer parce qu’on dit toujours qu’on n’a pas été élevé comme ça. Oui et non. Je veux dire que la société a évolué; alors, tu évolues avec la société, mais là, au moins, tu as des cours. Faut oser le faire, oser se tromper aussi. Moi, j’essayais des affaires, et ça ne fonctionnait pas et je me disais comment elles [les organisatrices d’Incita] ont fait pour le faire ? Mais c’est pas grave. Il faut pas avoir peur des échecs, ça va arriver parce que c’est nouveau. Il ne faut pas avoir peur d’essayer ces changements-là. »

Enfin, pour Joey Leckman, le conseiller municipal à la Ville de Prévost et le président chez la coop Tricentris, l’approche d’Incita est une réussite, puisqu’elle s’inscrit « dans la philosophie du virage vert où chaque geste compte, où chaque famille peut avoir un impact à long terme sur son environnement et sur d’autres familles ».

*Valérie est un pseudonyme pour la mère de cette famille qui désire garder l’anonymat.

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