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«Notre seule porte de sortie est la culture»
Jacinthe Laliberté – Invitée à donner une conférence, dans le cadre des Journées de la culture, Micheline Lanctôt, artiste bien connue des Québécois, a présenté sa perception de la culture aux Annelacois. Elle a « le sentiment que nous sommes dans une société qui s’ensauvage, qui provoque. Notre seule porte de sortie, serait la culture… »
« Micheline Lanctôt est une battante, une surdouée des arts, une cinéaste visionnaire, un monument de la culture québécoise qui n’hésite pas à aborder des sujets difficiles ». Présentée ainsi, à son auditoire, par les organisateurs de l’évènement, celle-ci a profité de l’occasion pour transmettre ses passions à la centaine de personnes amassées dans la salle du Centre communautaire de Sainte-Anne-des-Lacs.
« Je me considère comme une travailleuse de la culture. Je n’ai jamais eu la prétention de dire que j’étais une artiste, mais comme j’œuvre dans le domaine depuis plus de 50 ans, j’imagine que j’appartiens au milieu de la culture », a évoqué, d’entrée de jeu, Micheline Lanctôt.
La culture, un mot qui se perd
Tout provient du monde de la mondialisation et de l’information. Selon elle, un fracas médiatique constant provoque, une certaine dérive, un glissement dans les mots, ils perdent leur sens étant employés, souvent, à mauvais escient.
Un de ses amis sociologues, un jour, lui a donné la définition suivante : La culture est l’ensemble de l’activité humaine. Cette définition a évidemment engendré une discussion qui amène à conclure que tout devient culture : s’asseoir et jaser, aller au restaurant, pratiquer un sport. D’ailleurs, pour une meilleure compréhension, Micheline a, sciemment, choisi la boxe comme exemple puisque, pour elle, assister à un combat de boxe n’est pas de la culture.
En définitive, ce fut le vice-président de la Société des compositeurs dramatiques français qui, en lui présentant sa propre définition de la culture, s’est approché de la théorie de Micheline. Au final, la différence est que la consommation d’un produit bonifie le consommateur.
« Restée accrochée à cette définition, je continue à dire que la culture, quelle que soit l’œuvre, la pratique, peu importe le médium et sa nature ainsi que son degré de sophistication, la culture nous enrichit. Et, par conséquent, améliore la personne ».
Elle maintient qu’il y a quelque chose de fondamentalement éthique dans le phénomène culturel. Elle croit au pouvoir formateur de la culture qui peut arriver à bonifier la société. Elle conclut sur cette pensée : « Est-ce que l’on pourrait se donner un phare, un repère pour départager ce qui est fondamentalement culturel et qui permet d’enrichir de ce qui est une activité ou une animation singulière ? »
Sortir la culture du monde industriel
Micheline Lanctôt qui évolue dans le monde de la culture depuis plus de 50 ans comme comédienne, réalisatrice, scénariste, écrivaine et enseignante, souhaiterait sortir cette notion d’industrie culturelle de son milieu en soutenant que la culture n’est pas une industrie.
Elle s’explique : « Il est impossible d’associer la culture à l’industrie. Une industrie fabrique un produit qui est détruit lors de sa consommation contrairement à la culture. Catégoriser l’activité culturelle en tant qu’industrie, engendre, inévitablement, un rapport économique. C’est une attitude que l’on devrait refuser, dénoncer, si possible, car rapporter financièrement n’est pas nécessairement un impératif de la culture ».
Ayant participé à trois refontes de la Loi sur le cinéma, le problème reste entier. Au Québec, il est impossible de compétitionner contre les produits du marché domestique étasunien qui envahissent les écrans de cinéma. Malgré certains efforts politiques, travailler dans et pour la culture dans une espèce de complexe industriel est contradictoire.
Un film comme n’importe quelle autre œuvre doit bonifier. La scénariste avoue retirer beaucoup des réactions des gens. Ses sujets, même difficiles, sont nécessaires pour sensibiliser la population aux difficultés humaines comme la détresse chez les femmes, le désarroi. Ces difficultés ont des racines sociales provenant d’une société qui évolue. Impossible de s’y soustraire.
Sans éprouver de regrets, la cinéaste a décidé d’abandonner le cinéma. Comme la réalisation d’un film s’échelonne sur plusieurs années, âgée de 76 ans, elle ne peut plus s’investir autant.
Un message pour les aînés
Micheline a délaissé, l’instant d’une courte entrevue avec le Journal, les différents chapeaux qu’elle a portés. Encore très active, elle désire être porteuse d’un message aux aînés.
« J’aimerais leur dire de ne pas vieillir dans leur tête. C’est la seule clé qui permet de rester active malgré un corps vieillissant. J’ai mal aux mains, j’ai mal aux genoux, j’ai mal partout. Si, en plus, on vieillit dans sa tête, c’est fini. Bien vieillir, c’est garder une tête en santé ». Selon elle, l’utilisation de la technologie est cette clé. Cependant, les aînés sont, constamment confrontés à un effet pervers : la vitesse à laquelle la technologie change : « Si les aînés ne peuvent suivre, la société va les perdre. Un vice se cache derrière tous ces changements et ces mises à jour qui isolent les aînés. ».
Voici le constat qu’elle fait : nombre d’aînés sont à la remorque d’un membre de la famille pour pouvoir suivre l’évolution numérique de la technologie. S’ils sont seuls et n’ont pas d’aide, une cassure entre le monde actuel et les aînés survient.
Micheline suggère à la ministre des Ainés, présente dans la salle, de penser à un programme d’initiation à la technologie pour les aînés, et ce, particulièrement pour ceux qui habitent en région.
Une fin qui nous laisse sur notre faim…
« J’ai le sentiment que nous sommes dans une société qui s’ensauvage, qui provoque. Notre seule porte de sortie est la culture. Le rapport avec la culture devrait améliorer notre société et nous faire prendre conscience de l’utilité de cette dernière », de conclure Micheline Lanctôt qui, au cours de cette conférence, a démontré que la « vraie » culture est faite à l’image de la société qui accepte ou pas de l’embellir.