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Nicolas Michaud – Le 11 août 2023, la Fondation Rivières a dévoilé les résultats de son rapport sur la qualité bactériologique de l’eau en ayant pour objectifs « (1) d’évaluer le potentiel d’activités nautiques et de baignade dans la rivière du Nord entre Prévost et Saint-Jérôme, (2) de détecter les pics de contamination bactériologique et (3) de dépister les sources de contamination bactériologique responsables des pics de contamination ».
Entre juillet et septembre 2022, au moins deux fois par semaine, l’équipe de la Fondation Rivières a effectué le prélèvement de 149 échantillons d’eau de surface pour quatre sites de part et d’autre de la rivière : à Prévost, l’espace vert Louis-Morin, la berge du sentier des Éboulis, l’espace riverain de la rue Leblanc; à Saint-Jérôme, le Centre de location nautique du Parc régional de la Rivière-du-Nord. En se penchant sur la concentration d’Escherichia coli (E. coli), qui est un bon indicateur de la qualité bactériologique en eau douce, les données recueillies ont été analysées puis compilées dans un document avant d’être transmises aux deux villes concernées. À des fins de transparence et de sensibilisation, l’organisme à but non lucratif tenait également à téléverser le rapport complet de cette étude sur le Web pour le rendre accessible au public : https://bit.ly/rapport_dunord2022.
Danger ! Baignade non sécuritaire !
Au Québec, sur la base de cet indicateur microbiologique qui estime le nombre de bactéries viables dans un échantillon, il existe deux seuils : 1 000 UFC/100 ml pour les activités nautiques de contact indirect et 200 UFC/100 ml pour la baignade. En raison des risques accrus d’ingestion d’eau contaminée, la baignade sécuritaire requiert des concentrations bactériennes plus faibles que celles exigées pour la pratique d’activités nautiques.
Tout au long de l’été 2022, à l’exception d’un seul dépassement mesuré le 13 juillet aux alentours du sentier des Éboulis, l’étude démontre que les niveaux d’Escherichia coli étaient suffisamment faibles pour autoriser la pratique d’activités nautiques non motorisées sur l’ensemble des quatre sites mis en examen. En revanche, le potentiel de baignade s’est avéré inexistant, puisqu’aucun d’entre eux ne prouvait une qualité acceptable de l’eau.
Considérant que les abords de la rivière du Nord offrent un attrait d’envergure pour l’industrie récréotouristique des Laurentides, et que ce potentiel pourrait davantage être exploité aux profits des villes, ces dernières ont donc tout intérêt à améliorer la qualité de cette eau pour qu’elle ne représente plus de risques significatifs pour la santé humaine.
C’est la faute des municipalités ! Tapons sur les doigts de Sainte-Adèle !
Le document de 33 pages déposé par la Fondation Rivières met en lumière les sources de contamination : la qualité de l’eau qui coule dans la rivière du Nord est essentiellement dégradée par les rejets d’eaux usées des municipalités en amont. Si la qualité de l’eau est généralement bonne à l’aval du lac Raymond, elle se déprécie graduellement jusqu’à atteindre des niveaux élevés de coliformes fécaux à l’effluent de l’usine d’épuration Mont-Rolland située à Sainte-Adèle. À la différence d’autres municipalités qui privilégient une technologie de traitement des eaux usées par étangs aérés, celle-ci a plutôt choisi d’investir dans un système de traitement par boues activées et de désinfection par rayonnement ultraviolet. Se voyant ainsi décerner le titre peu enviable de plus grande source de contamination fécale en amont des quatre sites à l’étude, la petite municipalité de quelque 14 000 âmes manquerait à ses devoirs environnementaux et sanitaires en utilisant un traitement inefficace pour baisser le taux d’Escherichia coli dans l’eau. En réponse aux critiques formulées par le ministère québécois de l’Environnement à l’automne 2022, la ville de Sainte-Adèle assure avoir rectifié la situation en implantant notamment le nettoyage mensuel des lampes UV jumelé à un échantillonnage automatique à l’usine d’épuration. Récemment, des vérifications rigoureuses permettent de constater une baisse des contaminants, ce qui devrait maintenir les concentrations de coliformes sous la barre des 350 UFC/100 ml par mois.
D’autres problématiques du même ordre sont également observées le long de la rivière du Nord. À la Régie de Piedmont, Saint-Sauveur et Saint-Sauveur-des-Monts, il est jugé nécessaire d’optimiser le fonctionnement des étangs aérés de la station d’épuration. À Prévost, en période de pluie, il faut catégoriquement réduire les fréquences de débordements d’eaux usées pour l’ouvrage de surverse 05 amont PP Labelle qui est associé à l’usine d’épuration.
Des problèmes de surverses ! Encore !
Dans leur rapport, les scientifiques de la Fondation Rivières ont compté 31 ouvrages de surverses en amont des sites étudiés; de ce nombre, 21 ont débordé au moins une fois en période estivale depuis 2018. Deux ans plus tard, ce nombre a diminué pour n’atteindre que 10 ouvrages de surverses, et ce sont surtout ceux de Prévost qui débordent par temps de forte pluie, soit entre 6 et 14 fois par été. Toutefois, en 2021, Prévost a connu 2 débordements, mais, cette fois-ci, par temps sec : une situation qui doit impérativement être corrigée puisque ce type de débordement est interdit par le Règlement sur les ouvrages municipaux d’assainissement des eaux usées.
« Qu’est-ce qu’on peut faire pour s’attaquer au problème des surverses ? Nous, à la Fondation, c’est très clair que ça doit passer par le plus possible, par une restauration du cycle naturel de l’eau », déclare Philippe Maisonneuve, le conseiller en politiques publiques et qualité de l’eau chez Fondation Rivières. Certes, s’il convient qu’il faut limiter les débordements par temps sec et ceux en situation d’urgence, ce sont particulièrement les surverses en période de pluie qui sont les plus problématiques et qui nécessitent davantage d’investissements. Pour ce faire, il est primordial de réduire la quantité d’eau de ruissellement acheminée au système d’égouts. Alors que beaucoup proposeraient l’agrandissement des usines d’épuration ou l’excavation, puis l’installation d’un réseau qui séparent les eaux usées et pluviales, la Fondation Rivières croit plutôt qu’il faut privilégier les infrastructures vertes à ces infrastructures grises. Les premières offrent l’avantage d’être plus résilientes, moins dommageables pour l’environnement et moins chères financièrement que les secondes. C’est ainsi que par la végétalisation des espaces urbains, l’installation de pavés alluviaux et l’utilisation de la phytoremédiation (technologie de dépollution qui emploie le métabolisme des plantes), l’aménagement de ces infrastructures vertes apporte son lot d’avantages. Parmi ces bienfaits, Philippe Maisonneuve souligne une meilleure infiltration de l’eau de pluie dans le sol, la diminution des risques d’inondation, une réduction en nombre et en intensité des îlots de chaleur, une biodiversité plus forte, etc.
À la poubelle ! Pas à la toilette !
« S’il vous plaît, ne jetez pas les lingettes humides à la toilette, c’est à éviter à tout prix », supplie Philippe Maisonneuve. Il explique que l’usage de ces lingettes pour désinfecter les surfaces a connu un essor notable depuis l’arrivée de la pandémie de COVID-19. En dépit de la mention « jetable dans les toilettes » qui est publicisée par certains manufacturiers pour qualifier leurs produits, ce titulaire d’une maîtrise en écologie fluviale de l’Université de Montréal raconte qu’il n’existe pas encore de standards ni de réglementations sur la composition de ces lingettes. De ce fait, celles-ci coincent les pompes du réseau d’égouts en raison de leur épaisseur et de leur résistance plu grande que le papier hygiénique qui, lui, est plus mince et friable. Ces blocages sont loin d’être sans conséquence, puisque ces pompes assurent le maintien de la pression dans le réseau, et qu’une fois brisée, cela entraîne des débordements et des réparations très coûteuses pour les municipalités.