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Deux regards
Carole Trempe – La première partie de cette soirée consistait en la présentation de Delicate Power chorégraphié par Hélène Simoneau sur une musique de Caroline Shaw. En deuxième partie, Past Rooms, chorégraphié par Andrew Skeels, Montréalais d’adoption, sur une musique de Julien Tarride. Cette œuvre évoque la profonde tristesse ressentie par la perte d’une personne que l’on aime.
Delicate Power de Hélène Simoneau
Hélène Simoneau est une danseuse et chorégraphe québécoise qui a étudié et exercé principalement aux États-Unis. Depuis quelques années, elle est revenue au pays pour s’installer à Montréal tout en conservant un pied à terre à New York.
Elle en est à sa première collaboration avec le FASS avec une création née pendant la pandémie. La gestation de Delicate Power a été mise à rude épreuve par les circonstances engendrées par le travail en virtuel. Le rendu est teinté par un regard subtilement féminin sur la force, l’énergie, le courage et la résilience à l’image de cette prometteuse chorégraphe et pose la question : À quoi ressemble le pouvoir sans la nécessité de dominer ? Comment le pouvoir s’incarne-t-il lorsqu’il est inné et non pas âprement combattu ?
Cette œuvre aborde la notion du pouvoir par l’expression artistique de sept protagonistes féminines que l’on sent très engagées. Comment l’être humain maintient-il et exerce-t-il son pouvoir ? Par son corps ou sa voix puissante ou discrète. Par la force ou par la subtilité des scènes intenses où la musique apporte une force aux scènes douces et délicates, où tout se déroule subtilement, à l’intérieur de soi.
Une création qui évoque la force vibrante et innée chez la femme. La thématique a été intelligemment réfléchie par la chorégraphe. Un sujet sensible traité avec brio et aplomb. Une création bien de son temps. Une musique qui soutient le propos et des danseuses convaincues. Bravo, Madame Simoneau !
Past Rooms de Andrew Skeels
Skeels nous propose une odyssée raffinée. Une méditation à travers l’expression artistique de sept fabuleux danseurs qui expriment une émotion troublante partagée avec le public.
L’histoire est celle d’une femme insomniaque en proie à d’étranges visions nocturnes. Les personnages qui la hantent sont d’une exceptionnelle subtilité. Le tout se déroule avec une exquise lenteur, en douceur, en tristesse profonde. Une réflexion imaginaire touchante et chamboulante.
Avec une infinie tendresse, on nous amène à ressentir le poids du deuil et du chagrin. La trame musicale accompagne notre voyage émotionnel. Les danseurs en couple créent des ramifications sensuelles avec leur corps, leurs bras, leurs jambes tout en bougeant sans cesse en cercles. C’est visuellement très beau, c’est rond, c’est voluptueux, c’est inusité. On dirait un souvenir vivant, une métaphore du lien qui unit deux êtres qui s’aiment et qui cessent de vibrer ensemble au départ irréversible de l’un d’eux.
La réflexion profonde et triste sur le deuil nous est amenée toute en douceur et avec beaucoup d’amour de la part de ce fabuleux chorégraphe qu’est Andrew Skeels.
Un œuvre de très grande qualité ! Un magnifique spectacle de très haut niveau. Interpréter le passé pour donner du sens au présent, voilà ce que nous propose Skeels.