Mots et mœurs

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Gleason Théberge
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Avertissements

Gleason Théberge Dans la foulée des avertissements courants de nos jours, veuillez noter que cette chronique utilise des transcriptions écrites françaises pour les mots anglais cités.

Dans le Québec des années 50, tout le vocabulaire de l’automobile était en anglais. Il n’y avait que des tayeûr (pneu), bòmpeûr (pare-choc), hoûde (capot), wîndchield (pare-bise), waêpeür (essuie-glace), bréque (frein)… 

On en a d’ailleurs gardé l’habitude d’appeler l’essence du gaz (pour gazoline), mais si le prix n’est pas excessif quand on va gazer, c’est le plein qu’on fait de son réservoir. Je ne me rappelle cependant pas le nom donné au bouton de plancher qui servait à faire varier l’intensité des feux avant, mais je m’en souviens comme d’une invention très pratique même si, à l’époque, les deux pieds étaient autrement sollicités pour la conduite manuelle.

Or, pendant que les consignes de sécurité se multipliaient pour assurer davantage de protection sur les routes, la circulation devenait de plus en plus intense. L’influence de l’anglais et son usage de mots empruntés a d’ailleurs suivi le même rythme impérial, sauf en matière de carrosserie et d’accessoires des véhicules automobiles.

Que s’est-il donc passé pour que dans l’encombrement où le fonne a remplacé la joie, le plaisir, l’agrément et même occasionnellement le bonheur, nous en soyons arrivés collectivement à quitter les anciens anglicismes pour ne plus employer que des mots français pour nos machines ?

Des émissions de télévision fréquentées par tous, de Bobino à Passe-Partout, en passant par le toujours populaire Caillou, ont été écoutées par les enfants chez leurs parents, dans les garderies, aux centres de la petite enfance et à l’école primaire. L’Office québecois de la langue française qui supervise la production du matériel scolaire a régulé dans tous les aspects de la vie quotidienne l’emploi d’un vocabulaire correct. Nos lois québécoises sur l’affichage, bien que pleines de trous, malmenées et peu appliquées, de même que les efforts de francisation en milieu de travail ont depuis facilité l’usage et la visibilité du français.

Mais voilà que de nos jours avec l’électronique, beaucoup délaissent les trop fréquents messages publicitaires du téléviseur pour s’intéresser plutôt à leurs sites favoris sur leur multiphone. Ils y trouvent des pòdcast (émission enregistrée), des plélistes(sélection de musique), du strîmigne (diffusion en continu) et certains y écoutent ou visionnent surtout des productions en anglais. En fait, plutôt que causé par l’immigration, le désastre attendu viendra peut-être de ces écrans tactiles, que sous la pression sociale, les parents acceptent de fournir à des enfants en bas âge. Hameçonnés de pareille façon, ne considèreront-ils pas finalement le français comme langue de communication verbale seulement; à l’écriture, trop compliquée ?

Faudra-t-il exiger que des avertissements soient affichés avant chaque usage d’un média électronique ? 

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