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La réfection des sentiers de randonnée pour les rendre durables
Anthony Côté – Les changements climatiques ont des impacts dans les sentiers de plein air, surtout en forêt. Les pluies abondantes créent de l’érosion dans des sentiers mal localisés et/ou mal conçus.
C’est bien connu, la majorité des sentiers de randonnée des Laurentides et ailleurs n’ont pas été conçus pour un achalandage 4-saisons. À l’origine, c’étaient des sentiers hivernaux de sport de glisse comme le ski de fond ou encore la motoneige. Après la fonte des neiges, ces sentiers restaient virtuellement déserts. Or, avec la croissance de la popularité du vélo de montagne et de la marche en forêt, l’aménagement et l’entretien de ces sentiers ont montré leurs faiblesses. Le passage répété des randonneurs, surtout cyclistes, mais aussi marcheurs, compacte le sol du sentier et forme une dépression en cuvette qui retient l’eau de fonte des neiges et des pluies abondantes. Avec les dépressions en cuvette, deux phénomènes peuvent causer problèmes.
La compaction du sol empêche l’eau retenue dans le sentier de percoler dans le sol et crée des trous de boue. Ce phénomène est aggravé si le sentier est localisé dans un creux de terrain où l’eau n’a nulle part où s’écouler, ou pire encore dans une zone humide. Beaucoup des sentiers hivernaux ont été localisés dans les baissières à faible pente, ou encore, c’est souvent dans d’anciens sentiers forestiers à faible pente. C’était sans conséquence tant que le sentier ne servait que l’hiver.
La formation de cuvette de sol compacté dans une pente retient l’eau de ruissellement et crée des ruisseaux « intermittents ». Avec l’avènement des pluies abondantes dues aux changements climatiques, l’érosion dans les sentiers devient un problème environnemental et de sécurité non négligeable. Certains sentiers forestiers en pente douce n’ont pas été aménagés avec un souci de l’érosion et sont parfois construits près d’un ruisseau. Le passage des randonneurs aggrave souvent la situation en déplaçant les cailloux et le sol, donnant à l’eau de ruissellement de l’emprise pour continuer, voire aggraver l’érosion. Même l’ajout de nouveaux sentiers de vélos de montagne depuis la dernière décennie n’a pas tenu compte de ce problème de conception.
Un phénomène secondaire de la compaction du sol est l’apparition des racines d’arbres dans les sentiers. Attention : les racines n’ont pas remonté à la surface, mais c’est bien le sol autour des racines qui s’est affaissé en se compactant.
Des solutions existent
L’érosion dans les sentiers a été étudiée par les concepteurs de sentiers pédestres et de vélos de montagne depuis plus de 20 ans. L’IMBA (International Mountain Bike Association) a publié un excellent manuel de construction de sentiers de vélo de montagne en 2004. Vélo Québec et Rando Québec s’en sont inspirés pour publier des versions québécoises. On y retrouve, entre autres, quelques règles d’or qui s’appliquent autant à la marche qu’aux vélos de montagne :
- Éviter les baissières ou vallons, ce sont les lieux naturels pour l’évacuation des eaux de ruissellement.
- Ne jamais aménager de sentier dans la ligne de pente (ligne de ruissellement de l’eau).
- Aménager les sentiers en flanc de collines avec des pentes moyennes de 10 % (pente de 1’ par 10’ de distance). Limiter la pente maximum à 15 % (pente de 1’ par 7’ de distance). Faire des sentiers en lacets (zigzag) pour ne pas excéder le 15 %.
- Sauf exception, le sentier doit avoir une pente latérale d’au moins 5 % (1’’ de pente par 20’’ de largeur de sentier). Ceci permet à l’eau du haut de la colline de ne pas « s’attarder » dans le sentier et de le traverser sans causer d’érosion. La surface du sentier doit être compactée pour éviter la formation de dépressions en cuvette causées par l’achalandage.
- Enlever, dans la mesure du possible, la terre organique (terre noire) de la chaussée du sentier (pas toujours possible dans un vieux chemin forestier).
- Si on doit absolument passer dans une zone humide, une passerelle ou un trottoir s’impose selon la quantité d’eau présente dans la zone.
Pour les sentiers à problèmes existants, nous devons les corriger ou les déplacer, voire les fermer et les revégétaliser. Dans beaucoup de cas, faire disparaître la cuvette de compaction et/ou l’ajout d’une pente transversale de 5 % règle le problème. Dans certains cas, des travaux majeurs sont à prévoir, tel l’ajout de fossés pour diriger l’eau de ruissellement vers une « sortie », un ponceau sous la piste ou encore l’ajout de terre minérale. Quand c’est possible, déplacer le sentier hors d’une zone humide est la solution privilégiée. Quand le seul terrain disponible est une zone humide, il faudra prévoir des passerelles.
Beaucoup de nos sentiers de plein air ont besoin d’amour. Philippe Marchesseault, président d’Héritage plein air du Nord vous lance une invitation « Sortez vos pics et vos pelles, on va avoir besoin de beaucoup d’aide pour rendre nos sentiers les plus durables possibles. »