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Pour ou contre dans les sentiers de plein air ?
Anthony Côté – Est-il à conseiller d’étendre du paillis forestier dans un sentier ? Sinon, pourquoi ? Si oui, est-ce pour tous les sentiers ? L’utilisation de paillis forestier dans les sentiers est absente de la documentation technique. Des essais ont été menés dans les sentiers de la Forêt Héritage du secteur Haut-St-Germain.
Les guides de construction de sentiers, tant de randonnée pédestre que de vélo de montagne, sont clairs sur un point : la chaussée devrait être en terre minérale (terre sablonneuse). Par définition, la terre minérale se compacte bien pour former une surface solide et durable, surtout qui ne génère pas de boue glissante après une pluie.
Si nous nous limitons à cette « norme », toute matière organique devrait être écartée des sentiers. Ceci inclurait les feuilles mortes et… le paillis forestier qui se décompose après quelques années. Mais qu’en est-il des sentiers existants dont la chaussée est en terre organique; c’est pour ainsi dire la plupart des sentiers de notre région. Ils sont des sentiers hivernaux convertis en sentiers quatre-saisons, donc qui ne peuvent être, dans la majorité des cas, excavés pour rejoindre la terre minérale. Ce faisant, ceci créerait des dépressions en cuvette qui retiendraient l’eau de fonte des neiges et de la pluie. Dans certains cas, ils deviendraient des ruisseaux intermittents avec l’érosion qui en découlerait. Et encore, le fort achalandage dans ces sentiers compacte le sol et forme les dépressions en cuvette tant redoutées des gestionnaires de sentiers. De plus, le passage répété des randonneurs dégage les racines des arbres : il faudrait ajouter de la terre (minérale) pour les enterrer à nouveau, une tâche colossale.
L’hypothèse de départ de l’épandage de paillis forestier dans le secteur Haut St-Germain est d’assécher la chaussée boueuse au printemps ou après une pluie, et de protéger les racines à découvert. La logique disait : « Pas trop épais, SVP, ça pourrait déplaire aux amateurs de vélos de montagne ». L’épaisseur a été limitée à un pouce après compaction manuelle. Une bonne averse vient compléter la compaction. Qu’en est-il de la traction au freinage des vélos ? Somme toute acceptable. Ici, une anecdote sur la traction : le camion venu livrer le paillis forestier au bas d’une légère pente après une pluie a pu confirmer l’utilisation du paillis. Il n’arrivait pas à remonter vers la rue, faute de traction sur la terre mouillée. Plusieurs pelletées de paillis ont été étendues comme du « gravier sur la glace » et le camion a pu s’extraire remarquablement de sa fâcheuse position.
Des effets secondaires ont été constatés :
• Les marcheurs et joggeurs ont adoré la surface légèrement moelleuse et les cyclistes ont apprécié la surface sèche, libre de boue.
• À plusieurs endroits, le choix est donné aux randonneurs en créant deux sentiers distincts côte à côte : un en terre battue et l’autre recouvert de paillis forestier. La logique nous disait que les vélos préféreraient le sentier en terre battue et ils délaisseraient la piste recouverte de paillis. Eh bien : non ! Les traces de pneus étaient évidentes sur le paillis !
• Des témoignages de cyclistes étaient à l’effet que le roulement était plus doux près des racines (elles sont presqu’entièrement recouvertes de paillis forestier).
• L’érosion du paillis forestier par l’écoulement d’une pluie abondante nous a démontré que le drainage du sentier sous-jacent est à corriger.
• L’épandage de paillis forestier sur une chaussée en terre minérale n’apporte que des bénéfices négligeables.
Il y a des effets secondaires attendus comme :
• La décomposition du paillis forestier va progressivement enterrer les racines d’arbre et réduire la profondeur de certaines dépressions en cuvette.
• Une couche isolante réduit la détérioration du sentier au printemps par le cycle de gel-dégel. Ce même phénomène est aussi réduit en ne soufflant pas les feuilles mortes dans les sentiers à l’automne, mais plutôt au printemps.
Ces résultats nous enseignent que l’épandage de paillis forestier doit être limité aux sentiers existants où il s’avère très difficile de créer une chaussée en terre minérale. Une couche d’appoint sera requise annuellement pour compenser la décomposition. Dans la Forêt Héritage, ceci inclurait beaucoup de sentiers de ski de fond. La zone d’essais dans le secteur St-Germain sera étendue quelque peu et les résultats viendront confirmer ou infirmer la valeur de cette méthode dans le temps.