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Été?
Gleason Théberge, Après coup, on le trouve si court qu’on le croit venu directement du verbe être, comme tout ce qui a été. Et on n’a peut-être pas tout à fait tort. Les étés ont quelque chose d’accompli, mais d’après Le Robert, le vieux terme indoeuropéen aidh, dont le nom de la saison provient, évoque plutôt la chaleur, la clarté du soleil. L’ardeur en a aussi dérivé, tout comme l’éther, un mot qui a d’abord décrit la zone la plus élevée du ciel, où justement brille dans le lointain l’astre des mois les plus chauds.
Cette période dite estivale est d’ailleurs l’occasion de fêtes intimes et de nombreux festivals publics, deux mots que la finale commune apparente : festival et estival. La dimension festive provient pourtant plutôt de cette idée des festivités qui peuvent évidemment avoir lieu en toutes saisons.
L’été, c’est aussi le temps des contrastes, par exemple celui des vacances que celles et ceux qui le peuvent passent à se reposer ou se fatiguer autrement avant de vaquer aux tâches dont il tire un salaire. Un double sens apparaît ainsi, puisque vaquer signifie à la fois qu’une personne est active (vaque à une occupation) et qu’il y a inoccupation quelque part (siège vacant à une instance ou disponibilité d’une chambre d’hôtel).
Mais le plus grand contraste concerne les conditions climatiques. En juillet et août, la douceur matinale d’un vent frais peut être suivi d’une chaleur conforme à l’origine du nom de la saison, surtout lors d’une canicule prolongée entraînant sècheresse et feux de forêt. Les espaces climatisés ou l’environnement de feuillage ou de plans d’eau s’opposent alors aux lieux sans arbres ni piscines, où les rayons du soleil chauffent le noir asphalte des rues.
Nous en subissons moins les outrages, mais l’été, à l’envers du temps trop sec, c’est quand même de plus en plus la saison des tempêtes jetant les branches sur les fils électriques et celle des pluies abondantes capables de créer des inondations. Le français accueille d’ailleurs trois termes de provenances diverses pour décrire les plus violents excès.
Repris en arabe et utilisé en Asie, le typhon correspond à un dieu grec des vents violents, moins connu que l’Éole tout à fait moderne et moins brutal. Nos tourmentes désormais surtout mentales et nos tornades ont été empruntées à l’espagnol tornado(vent tournant); et chez les Mayas, le dieu Hurakan a laissé son nom aux ouragans qui naissent dans les eaux chaudes du sud. Selon la tradition, lui et son frère jumeau Gucumatz ont créé le monde par la parole (un procédé familier aux juifs et aux chrétiens). Puis ils ont fait naître des humains en quelques tentatives, dont les deux premières ont entraîné leur terrible colère contre des créatures imbéciles. Le troisième essai utilisant la pâte de maïs leur a permis de créer quatre couples, une variété offrant un meilleur développement génétique que le seul couple de la bible. Or, nos dirigeants et grands financiers ne témoignent-ils pas d’une imbécillité déjà punie par les ouragans? L’espèce humaine n’aura donc à court terme qu’été?