Flûte Alors !

Un concert haut en couleurs

Sylvie Prévost – Trois « flûte-à-becquistes » nous en ont mis plein les oreilles en un concert couvrant de la Renaissance à notre époque.

Un titre fort bien choisi, donc, pour un programme qui arpente l’expression musicale en un va-et-vient constant. Flûte Alors ! est un ensemble formé de musiciens chevronnés et éminemment curieux, qui aiment tout du répertoire des flûtes à bec.

Ainsi, les pièces de Giles Farnaby présentent bien les atouts de la musique de la Renaissance : de courtes pièces, comme autant de chants à plusieurs voix. La flûte soprano a le plus souvent la vedette. Les autres ont leur propre vie, mais au final, elles finissent par toutes se tresser joliment en des mélodies qui font image. La pièce contemporaine de Matthias Maute qui a suivi est la réponse d’aujourd’hui à cette écriture, car la mélodie principale, plutôt simple, se pose sur un accompagnement qu’on peut qualifier de dément. 

Il faut souligner ici la parfaite prestation des trois flûtistes. Leur justesse est remarquable, la précision, les entrées, des retards, du rythme en général est impressionnante. Oubliez les flûtes sopranos qui vrillent le tympan et les basses qu’on n’entend pas. Le son et les effets sont bien équilibrés. Flûte Alors ! est plus qu’un ensemble, c’est une sorte d’organisme vivant, tricéphale et à six mains parfaitement coordonnées.

Nous avons fait quelques heureux allers-retours entre les époques et les lieux. Nous avons même fait un beau voyage en Afrique grâce à Sören Sieg. Puis, voilà Bach, grâce à des arrangements maison par Alexa Raine-Wright. J’ai été soufflée d’entendre combien ces pièces ont merveilleusement rendu toute la complexité de la manière de Bach, contrepoint et fugue compris, sur des chorals simples. Ce fut une découverte extraordinaire, un regard neuf par les oreilles, si je puis dire. 

Si on en doutait encore, Kadanza, de Willem Wander Van Nieuwkerk, un autre morceau contemporain, confirme la parfaite synergie des musiciens. Tout en contretemps, la pièce serait autrement redoutable… Mais elle passe et on en redemande. 

Flûte Alors ! nous sert bien plus que des quadruples croches à la verge. On a senti tout du long, non seulement la maîtrise à tout point de vue, mais aussi des musiciens heureux de ce qu’ils font, heureux d’être ensemble et passionnés par leur répertoire. C’est ce qu’il faut pour que le public se sente lui aussi comme un poisson dans l’eau !