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Là où les chemins de fer se croisaient
Benoit Guérin bguerin@journaldescitoyens.ca – Peut-on penser que Piedmont fut pendant plus de 10 ans le point de rencontre entre deux voies ferrées, une vers le nord du Canadien Pacific et le terminus d’une ligne se dirigeant vers l’ouest soit le chemin de fer de la colonisation de Montfort ?
Revenons un peu en arrière, en 1890, la compagnie Montfort Colonization Railway présidée par Joseph Brunet, conseiller municipal de Montréal, est créée avec l’objectif de développer un chemin de fer de Saint-Sauveur (maintenant Piedmont) vers Montfort à l’ouest. Bien sûr, le célèbre curé Antoine Labelle a été aussi le promoteur du chemin de fer de Montfort qui permettait de relier l’orphelinat de Montfort à Montréal d’où provenait une grande partie de la clientèle. Le chemin de fer permettait aussi la colonisation du nord-ouest de la région, colonisation encouragée par le célèbre curé.
À ce moment, le chemin de fer n’est pas construit selon la largeur courante utilisée par la majorité des chemins de fer en Amérique du Nord, soit 4 pieds 8 pouces et demi mais bien selon une norme qu’on appelle « chemin de fer économique » ou « narrow gauge » de 3 pieds de largeur. On présume qu’à cette époque, le chemin de fer de Montfort a récupéré les voies et le matériel roulant du chemin de fer du Témiscamingue qui était démantelé au même moment ou le chemin de fer de Montfort était construit. Certains prétendent que le chemin de fer économique permettait des pentes et des courbes plus prononcées ce qui était le cas de Piedmont à Montfort. Rapidement, la voie ferrée économique sera convertie au mode « standard », et ce dès l’été de 1897. La voie ferrée « standard » utilisée par la majorité de compagnies ferroviaires d’Amérique du Nord permettait de transférer un wagon de marchandise par exemple, sur la voie du C.P. pour que celui-ci puisse poursuivre sa route vers Montréal sans être obligé de tout décharger à Piedmont et de recharger l’autre train. De plus, les pièces et le matériel roulant étaient aussi plus disponibles que le matériel roulant et les pièces du chemin de fer économique, la ligne de Montfort ne pouvant compter que sur seulement deux locomotives adaptées aux voies de 3 pieds.
Le site de Piedmont servait de terminus et de lieu de correspondance avec le C.P. pour les voyageurs qui voulaient poursuivre leur route vers Montréal. Ce lieu de correspondance, qu’on retrouve dans les horaires des trains de l’époque sous l’appellation de Montfort Junction, se retrouvait sur la rive est de la rivière du Nord, au sud de l’actuelle passerelle Jacques-Raymond qui conduit au parc du P’tit train du Nord, anciennement la voie du Canadien Pacific. Comme il n’y avait pas de gare, les trains étaient stationnés en parallèle, les marchandises et les bagages des passagers étaient transférés « à bras » d’un train à l’autre comme le démontre l’illustration jointe.
À Piedmont, le train de Montfort repartait vers l’ouest, traversant la rivière du Nord au sud de l’actuelle passerelle Raymond (un pilier est toujours existant en bordure de la rivière), pour poursuivre sa route en longeant l’actuelle rue du Pont. La boulangerie Merci la Vie est située plus ou moins dans l’ancienne emprise. De là, le train se dirigeait vers l’actuelle rue du Moulin (ancienne route 11), pour traverser le Grand ruisseau et se diriger vers Saint-Sauveur.
En 1907, alors propriété du Canadian Northen Railway, la jonction Montfort à Piedmont est finalement abandonnée, puisque dorénavant le chemin de fer peut poursuivre sa route sur une nouvelle voie de Saint-Jérôme à Saint-Sauveur en passant par Shawbridge du côté ouest de la rivière du Nord pour être reliée aux voies existantes de la Canadian Northern dont la voie Hawkesbury- Joliette-Québec qui passait au sud de Saint-Jérôme. Rachetées par le Canadien Natio-nal, ces voies lui ont permis de concurrencer le C.P. pour les destinations de ski des Laurentides, dont Shawbridge et Saint-Sauveur, dans les années 1910 à 1940 environ.
Le boulevard Jean-Adam à Saint-Sauveur et une partie de la route 364 pour Morin-Heights ont utilisé l’emprise ferroviaire rachetée par le C.N. qui fut démantelée en 1962. À Morin-Heights, le tracé de la voie ferrée est devenu le Corridor aérobique bien connu des adeptes de plein-air.
Merci à Robert Sandusky de nous permettre d’utiliser son illustration de la jonction des deux chemins de fer. Un merci particulier à Peter Murphy, administrateur de ExpoRail pour toutes les informations et sa connaissance profonde du dossier. Merci finalement à Marc-André Morin pour les informations.