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Vers un exode d’une partie de la communauté?
Émilie Corbeil emilie.corbeil@journaldescitoyens.ca – La crise du logement frappe fort dans les Laurentides, haut lieu de migration des habitants de la ville qui ont désiré se confiner dans des lieux plus agréables, alors que la montée du télétravail le leur permettait.
Les problèmes quant à la disponibilité de logements abordables et subventionnés étaient connus depuis déjà longtemps. Seulement, le manque existant a été exacerbé par cet intérêt nouveau pour les Laurentides et on soupçonne qu’il ne manquera pas seulement de loyers modiques, mais aussi d’habitations à la portée des familles de la classe moyenne. En entrevue avec le Journal, madame Violaine Guérin, coordonnatrice pour le Conseil régional de développement social des Laurentides (CRDSL), a dressé un portrait hautement préoccupant de la situation dans la région.
Urgence d’agir
Depuis plusieurs années, le CRDSL est porteur du comité logement régional. D’entrée de jeu, madame Guérin souligne que la problématique du logement n’est ici pas nouvelle : on en parle depuis une bonne dizaine d’années. En effet, il y a une décennie, on déplorait le manque de quelque 3000 logements abordables sur le territoire. Mais à partir d’avril dernier, l’organisme a remarqué que nous étions devant une réelle urgence.
Très rapidement, le CRDSL a procédé à l’embauche d’une chargée de projet dédiée au dossier du logement. Un comité stratégique de crise a été mis en place, réunissant tous les acteurs susceptibles de pouvoir apporter des solutions et partager les meilleures pratiques qui ont cours.
Sonder pour mieux comprendre
Certains constats faits, à savoir une hausse constante des prix des logements, combinée à l’augmentation des rénovictions et des reprises de logements par les propriétaires, le CRDSL a mis en ligne, entre le 19 avril et le 31 mai dernier, un sondage afin de mieux comprendre la problématique et de cibler certaines actions prioritaires.
Un rapport détaillé sur les résultats du sondage est attendu dans quelques semaines. L’Institut national de santé publique du Québec a même informé l’organisme de son grand intérêt pour le sondage et a offert l’aide de ses analystes afin de procéder au traitement des données. On aura une meilleure idée des liens entre la pénurie de logements et les gens qu’elle touche, allant de la taille et des revenus des foyers aux potentiels problèmes de santé mentale.
Cri du cœur
Dans les Pays-d’en-Haut, un cri du cœur a été lancé dans les journaux, appelant tous les propriétaires de logements disponibles à se manifester, afin d’être mis en contact avec des chercheurs de logements. Dans la MRC des Laurentides, une ressource a été dédiée à la prise des appels des propriétaires et des chercheurs de logement.
Si certains motels ont accepté d’accueillir les personnes dans le besoin, ils sont de moins en moins enclins à le faire, la haute saison touristique ayant débutée et les locations journalières étant beaucoup plus payantes. De toute manière, ils ne sont qu’une solution transitoire et refusent souvent la clientèle en manque de logement, qu’ils ne jugent pas appropriée dans le cadre de leurs activités d’affaires.
Une réglementation municipale à revoir
L’organisme tente depuis des années d’inciter les Municipalités à modifier leur réglementation afin de promouvoir la construction de logements abordables et de prévenir l’exode forcé des personnes qui peinent à se loger vu la hausse des loyers. Il existe trop peu de Municipalités et de MRC avec ce type de politique en place. Selon madame Guérin, elles n’auront toutefois « pas le choix de se réveiller, vu les impacts et répercussions économiques importants que cela présentera, entre autres, au niveau de la rétention de la main d’œuvre, dans un contexte où les transports en commun ne sont que difficilement accessibles ». Notons qu’un travailleur au salaire minimum ne trouvera pas de logement répondant au maximum admis de 30 % des revenus bruts dédiés au logement dans plusieurs municipalités des Laurentides.
En récente entrevue au Journal Accès, le maire de Saint-Sauveur, monsieur Jacques Gariépy, suggérait que le Transport adapté et collectif des Laurentides (TACL) pouvait être une solution pour ceux qui ne peuvent plus se loger à Saint-Sauveur et doivent s’en éloigner, dans des lieux plus isolés où les logements sont moins chers.
À ce propos, le Journal s’est entretenu avec un résident de Saint-Sauveur, dont la maison a été reprise par le propriétaire en vue de la vendre. Ce dernier, possédant des revenus limités, ne trouve aucun logement répondant à ses besoins à Saint-Sauveur, à Piedmont ou à Prévost. Pour lui, qui est âgé et sans voiture, l’éloignement forcé prendrait des airs de petite mort. Tous les jours, il marche dans le village. Y fait ses courses, y rencontre des amis.
« Les personnes qui n’ont pas les moyens de payer un trois et demi 1300 ou 1400 dollars par mois ne sont pas forcément des personnes inactives, elles sont souvent les personnes qui font du bénévolat, qui aident leur voisinage et participent activement à la vie communautaire ».
Les propos de madame Guérin rejoignent ceux de ce citoyen qui craint d’être forcé à l’exil : c’est l’isolement social, l’absence de services de proximité et la détresse psychologique qui guettent ces personnes. Pour la communauté, cela représente également une perte importante, alors que tout un pan de cette dernière est poussé à partir. On doit réfléchir collectivement et sérieusement afin de trouver des solutions à long terme, permettant la construction de logements diversifiés qui répondent à autant de besoins. « Il est temps que les élus retroussent leurs manches et prennent soin de leur population ».