Hommage à Jacques Lacoursière

Jacques Lacoursière - journal des citoyensPhoto: Rémy Boily L’historien Jacques Lacoursière.
Daniel Machabée
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Son œuvre d’historien lui survivra

Daniel Machabée danielmachabee@journaldescitoyens.ca – Le Québec vient de perdre un de ses plus illustres historiens. Vulgarisateur hors pair, proche du grand public, toute sa vie fut façonnée à rendre l’histoire du Québec accessible à la population. Émule d’un autre grand historien québécois, Denis Vaugeois, Jacques Lacoursière a eu la vocation historique tardive, après avoir passé un après-midi aux Archives nationales.

Son héritage à la société québécoise est indéniable. Il commence d’abord au ministère de l’Éducation et passe au ministère des Affaires intergouvernementales comme attaché politique. Il a contribué longtemps à la revue Nos Racines, qui a servi de base plus tard à son Histoire populaire du Québec. En 1977-1978, il a été recherchiste et conseiller historique pour la célèbre série Duplessis de Denys Arcand. Mais c’est surtout avec la télésérie historique Épopée en Amérique en 1996 qu’il est reconnu du grand public. Récipiendaire de nombreuses distinctions, on le voit être fait chevalier de l’Ordre national du Québec en 2002, puis de celui du Canada en 2006, pour ensuite recevoir la Légion d’honneur française en 2008. Cerise sur le gâteau, il sera fait chevalier de l’Ordre de la Pléiade en 2015, ultime reconnaissance internationale à sa riche contribution à la communauté francophone internationale.

Au-delà du parcours professionnel de l’homme, attardons-nous sur l’historien passionné qu’il était. Son œuvre voulait montrer à la nation québécoise toute la richesse de son histoire, toute la nécessité de la comprendre et de l’aimer sans hésitation. Combien de fois ne l’a-t-on pas vu se déguiser avec des costumes d’époque afin de rendre l’histoire vivante ! Conteur hors pair, un peu comme le fait si bien Fred Pellerin, il incarnait pour le peuple une sorte d’icône. Sa popularité était telle, dans les années 1990, raconte Denis Vaugeois : « que les gens s’agglutinaient autour de lui et voulaient le toucher quand on allait au Salon du livre. » Sa popularité ne l’a jamais fait oublier ses modestes origines des quartiers de Shawinigan. Il demeurait humble et d’une très grande simplicité lorsqu’il répondait aux gens. 

Autodidacte, lui qui fut d’abord littéraire avant d’être historien, il maniait de façon exceptionnelle une plume qu’il voulait rapide, complice tacite d’une mémoire fabuleuse et d’une extraordinaire intelligence. Ce que nous retenons de monsieur Lacoursière, nous les historiens, c’est bien sûr la façon sublime dont il abordait sa science. Fidèle à l’histoire-récit, il n’a jamais considéré l’Histoire comme une matière sociale, mais comme une épopée de gens et d’événements à raconter avec toutes les anecdotes possibles. 

Je n’ai pas connu personnellement Jacques Lacoursière, même jamais croisé. Mais je garde en moi ses récits éloquents de notre aventure en Amérique à travers ses écrits, mais surtout avec les images de sa narration incroyable d’une Épopée en Amérique. La richesse de son legs à notre société est immense. Il y eut de grands historiens qui nous ont fait comprendre d’où l’on venait, comme François-Xavier Garneau, le tout premier, Lionel Groulx, Robert Rumilly, Guy Frégault, Jean Hamelin, Marcel Trudel, et il y a de ceux qui, comme Jacques Lacoursière, nous ont fait aimé nos tribulations sur cette terre d’Amérique, sans chercher la polémique, ni la provocation, et surtout, en nous faisant comprendre avec des mots simples qu’il ne fallait surtout pas avoir honte de notre passé et d’être ce que nous sommes. Merci Jacques !

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