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Apprivoiser le vent tout en s’amusant
Diane Brault – Nous sommes dans la commune de Schœlcher. Notre regard n’arrive pas à quitter la mer. À voir tous ces bateaux dans la baie, nous nous sentons nostalgiques. Cette nostalgie de tous ces moments de plaisir et de montées d’adrénaline ressentis autrefois sur notre voilier. Pendant cinq ans, nous étions avec notre catamaran à naviguer en légèreté, sans bruit avec seulement le souffle du vent comme musique de fond. Après la vente de notre bateau, nous avons renoncé à pratiquer la voile sportive.
Le 13 février 2020 à Schœlcher, au Cercle nautique, nous louons un voilier, un catamaran. Un pur coup de tête. On monte les voiles pour nous. Après s’être convenablement vêtu pour l’activité, c’est la mise à l’eau. Nous prenons le large à l’Anse Madame. Le vent est à 15 nœuds soit 24 à 30 km/h avec rafales au large. Soleil, ciel bleu, nous quittons la plage de sable volcanique à bord de notre Hobie Cat aux voiles multicolores. Nous anticipons déjà le plaisir de la vitesse que nous pourrons atteindre une fois rendu dans la baie de Fort de France. Le vent et la mer nous attendent.
L’Antistress
Nous avions oublié combien la Terre est belle vue de la mer. Les pieds bien installés sur les bords portant et prêts à s’accrocher au trapèze en cas de besoin, un sentiment d’évasion nous envahit. Notre esprit se libère. C’est le dépaysement. Il y a dans nos oreilles que le sifflement du vent et le son des vagues qui déferlent sur les coques. Notre attention au présent ainsi que notre esprit d’initiative et de complémentarité sont renforcés. Il nous faut quitter l’Anse en louvoyant entre les voiliers au mouillage. Le vent tourne, mais ça va. Au large, dans la baie de Fort de France, les vagues se font plus corpulentes, plus impressionnantes, plus irrégulières et l’on aperçoit sur leur dos des rides blanches.
Un Hobie Cat c’est une embarcation particulière. Un seul mat, deux voiles, deux coques et un trampoline. Ce catamaran léger avec sa forme unique fend les flots à des vitesses inconnues des autres voiliers de plaisance. Quand le vent souffle fort, des émotions vibrantes sont garanties pour peu que les équipiers soient expérimentés. Il faut jouer intelligemment avec les forces véliques et les forces aérodynamiques. La difficulté principale réside dans le fait que toutes ces forces s’exercent en même temps. Risée, rafales ou vent fort mettent le bateau en équilibre instable. C’est à nous coéquipiers de manœuvrer adéquatement. C’est le soleil ou le chavirage. En une fraction de seconde, tout peut basculer.
Le dessalage, un grand moment
Si le plaisir de la vitesse et la recherche constante de l’équilibre sont des moyens fabuleux de s’éclater, il faut envisager tous les possibles. Du contrôle à la perte de contrôle. De la prudence à l’inattendu. Pour tous les navigateurs la situation peut changer très rapidement. Dessaler, chavirer en pleine mer ramène n’importe quel amateur ou professionnel de la voile à cette réalité, l’océan comporte son lot de difficultés et de dangers.
Sur les eaux couleur émeraude, notre voilier s’est couché suite à une rafale. Un dessalage dans sa forme classique. Tout va bien, pas de blessure, pas de casse. Quand la mer est agitée, le bateau dérive, l’important est d’y rester accroché et de garder son calme. Un catamaran dérive vite sous la force du vent. Difficile de nager pour le rattraper. Deux défis se présentent alors à nous. Redresser le bateau et remonter à bord. Nous ne sommes plus qu’une petite coquille de noix flottante sur la vaste mer des Caraïbes.
La navigation à voile, une belle école de la vie
Victor Hugo a écrit: « la mer est un espace de rigueur et de liberté, qui oublie la rigueur perd sa liberté. » Un simple cordage mal installé peut faire toute la différence sur un coup de vent. On ne s’est pas rendu compte avant le départ que le palan de l’écoute de la grand-voile et son cordage /tait entrecroisé. Ceci a entrainé une difficulté à faire diminuer rapidement l’ardeur du bateau sous la rafale. Du rivage, un catamaran ne passe pas inaperçu quand il verse. Tenter plusieurs fois de resaler un bateau dans une mer agitée peut nous amener à la longue à l’épuisement. Il nous faut faire le contre poids, mais cela ne suffit pas à redresser le bateau. Avec l’aide de Pierre qui arrive en Zodiac, le catamaran se relève enfin. Nous remontons sains et saufs sur notre « bolide des mers » afin de poursuivre notre navigation.
Nous étions devenus avec le temps et l’âge, des citadins du quotidien, des passionnés de la voile en cale sèche dans notre salon. Quelle journée mémorable ! Nous sommes redevenus rêveurs et aventuriers. Bouger en voile c’est faire son plein d’air marin et de liberté.