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La rivière est-elle prête à nous accueillir ?
Michel Fortier – Des citoyens et des mairies commencent à s’intéresser sérieusement aux accès et usages possibles de la rivière du Nord. La mairesse Rochon de Piedmont rêve d’offrir un accès aux canots et kayaks à partir du parc Gilbert-Aubin, le maire Germain de Prévost rêve d’installer une école sur les bords de la rivière avec un programme accès nature et la Ville de Saint-Jérôme a déjà lancé un programme d’accès à la pêche urbaine. Mais pourquoi avons-nous abandonné ces usages qui ont été si prisés dans le passé ?
Les usines qui ont accompagné le développement des Laurentides ont aussi beaucoup « apprécié » la rivière et ils l’ont passablement polluée. Puis les municipalités se sont mises à grossir et à accueillir de plus en plus de résidents permanents ou de passage. Cette croissance démographique a nécessité le développement des égouts sanitaires. Jusqu’à la fin des années 80, les égouts pluviaux étaient naturellement branchés sur les égouts sanitaires et tout ça se jetait directement dans la rivière. Le développement d’usines d’épuration devait permettre de rejeter une eau salubre à la rivière, ce qui fut fait avec un certain succès en période sèche, mais pas en période de pluie. Les usines d’épurations débordent et des installations de rejets (ouvrages de surverse) ont été installées afin de ne pas dérégler les usines d’épuration. Afin de réduire l’impact de ces surverses sur la rivière, les ministères des Affaires municipales et de l’Environnement ont développé des incitatifs afin d’emmener les villes et municipalités à séparer les égouts pluviaux de leurs égouts sanitaires. On conviendra que ces politiques sont beaucoup plus faciles à réaliser pour de nouvelles constructions que pour des constructions déjà existantes.
Impacts sur la rivière
Alors qu’en est-il de la situation actuelle de la rivière et quels sont les impacts des eaux non traitées déversées dans la rivière ? On peut prendre connaissance de ces impacts en consultant iEAU, produit par Abrinord avec l’aide des municipalités. Lancé en 2010, ce programme a permis de faire un suivi de la qualité des cours d’eau du bassin versant de la rivière du Nord. On y analyse quatre facteurs : la présence de coliformes fécaux, la matière en suspension, le phosphore et la conductivité spécifique. L’ensemble de ces facteurs sont des indicateurs de la qualité de l’eau d’un cours d’eau. Mais au Journal des citoyens, nous nous sommes davantage préoccupés de la présence de coliformes fécaux parce qu’ils sont un indicateur de pollution fécale indiquant la présence de bactéries et de virus pathogènes. Ce facteur ayant un impact sur la santé humaine, il a été déterminé que la présence de plus de 200 ufc/100 ml d’eau (unité fécale coliforme par 100 millilitres d’eau) interdisait la baignade et que plus de 1000 ufc/100 ml d’eau interdisait tout usage récréatif, soit la pêche et le canotage. C’est ainsi qu’on peut s’interroger sur l’état de la rivière pour s’y baigner ou y pratiquer des activités nautiques.
État de la rivière
Alors si vous analysez les rapports de iEAU sur Abrinord, vous découvrirez que de 2010 à 2015, sous le pont Shaw de Prévost, l’eau de la rivière affichait une moyenne de 610 ufc/100 ml et 23 dépassements du seuil de baignade (200 ufc/100 ml) et 8 dépassements du seuil pour usage récréatif (1000 ufc/100 ml). Les données plus récentes de 2017 affichaient une médiane par temps sec de 360 ucf/100 ml et 865 ucf/100 ml par temps pluvieux. C’est malheureusement une situation qui s’est détériorée depuis 2011, où toutes les mesures de médiane par temps sec indiquaient une quantité de coliformes inférieure à 200 ufc/100 ml.
Mais qu’en est-il de 2018 ?
Les mesures prises au cours de l’été l’ont été en temps de pluie et ont indiqué 560 et 570 ufc/100 ml en juin et juillet, ce qui ne proscrit pas les usages récréatifs, par contre octobre indiquait 10 000 ufc/100 ml par temps sec. Nous n’avons pas encore d’explication sur ce qui aurait causé cette situation, mais compte tenu de l’absence d’avertissement de la part des municipalités en amont de Prévost, cette situation est préoccupante. Dix mille ufc/100 ml, c’est dix fois la limite pour l’interdiction des usages récréatifs. Heureusement que le mois de novembre n’est pas exactement une période pendant laquelle on se promènerait en canot, on se baignerait et où on pratiquerait la pêche !
Perspective d’avenir
Les perspectives d’avenir pour le développement des activités nautiques sur la rivière du Nord vont dépendre de l’engagement des municipalités à collectivement réduire leur impact sur la rivière. Pour chacune d’elles, l’état de la rivière dépend de la municipalité en amont. Ainsi l’ensemble des municipalités doivent agir de concert afin de ramener la médiane des coliformes fécaux sous la barre des 200 ufc/100 ml d’eau, et cela ne peut être réalisé qu’avec la coordination d’Abrinord et un courage démultiplié des municipalités.
– Pour information : www.abrinord.qc.ca (la fiche iEAU).