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Table ronde au cégep de Saint-Jérôme
Louise Guertin – Le 19 septembre au cégep de Saint-Jérôme se tenait une table ronde sur le « bien commun » organisée par les syndicats des professeurs de Saint-Jérôme et Lionel Groulx. C’est une affirmation du chercheur et député caquiste récemment élu pour Saint-Jérôme, Youri Chassin, qui a motivé ce débat : « Si je me montre si suspicieux envers les solutions étatiques, c’est principalement parce que je ne crois pas au mythe d’un État au service du bien commun. Déjà l’idée qu’il puisse exister un “bien commun” sonne l’alarme. »
Devant une cinquantaine de personnes, Alain Deneault, chercheur et directeur de programme au Collège international de philosophie à Paris, connu pour sa critique des minières et des paradis fiscaux, Mariane Di Croce, professeure de philosophie au cégep de Saint-Jérôme et doctorante à l’Université d’Ottawa et Julia Posca, sociologue et auteure, de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) ont décortiqué divers aspects du bien commun, de son poids déclinant dans les politiques publiques des dernières décennies proposant la nécessité d’un débat public plus large.
Un concept qui rétrécit
D’entrée de jeu, Alain Deneault explique que même si le bien commun est une idée intuitive, il demeure difficile à circonscrire soulignant que c’est un concept qui a évolué. Il s’est réduit « en expulsant le commun » de sa définition. « Quelle est la part du bien commun quand on parle des écosystèmes comme l’eau, l’air, le territoire, les richesses naturelles ou quand on construit un pont ou encore quand on enseigne l’histoire ? On dit le peuple insatisfait. C’est qui le peuple ? Un sondage ? La majorité silencieuse ? »
L’état au service de la concurrence
Mme Julia Posca, auteure du récent ouvrage Le manifeste des parvenus (Lux 2018), affirme que depuis 30 ans il y a eu une remise en cause de l’état social, de l’État providence, « les classes politiques au pouvoir nous promettent de mettre en place des solutions pour que le privé face les choses ». Elle donne des exemples de cette évolution : les partenariats publics privés pour les hôpitaux universitaires, les coupures dans la fonction publique et la perte d’expertises ayant donné les services en sous-traitance. « C’est un terreau fertile pour la corruption, comme l’a démontré la Commission Charbonneau ».
On a changé le rapport du citoyen à l’État embrassant la tangente que lorsque c’est gratuit pour les citoyens, il y a gaspillage, ce qui a mené à l’instauration de frais aux usagers ou frais modérateurs. Pour de nombreuses familles, les tarifs représentent une fiscalité régressive. Les infrastructures publiques en santé et en éducation sont à bout de souffle.
Une autre démonstration du poids accru du privé dans le domaine public, selon Mme Posca, les subventions au privé dont la viabilité économique et sociale sont douteuses : Bombardier et la cimenterie Port-Daniel, Qébécor et le centre Vidéotron à Québec ou encore, les barrages électriques privés.
La professeure Di Croce observe que dorénavant « tout est soumis au critère d’utilité, de marchandisation. Être incapable de dissocier l’économie d’aucun enjeu mène à la dénaturation du domaine politique. On est dans la gestion collective des intérêts privés. » La dernière campagne électorale où les enjeux ont été segmentés selon les clientèles en est un exemple. Cette logique individualiste efface la notion de bien collectif.
Ouvrir le débat
Selon Deneault, nous sommes face à une sorte d’indifférence et il y a urgence à militer pour redonner à la notion du bien commun ce qu’elle a de noble; par exemple, pour la santé ou encore l’éducation.
Qu’est-ce qu’on fait ? Mme Di Croce suggère que nous avons besoin d’espaces publics variés pour débattre d’enjeux collectifs : discuter, comprendre et agir ensemble, « pour définir les contours du bonheur public ». Elle a donné en exemple la grève étudiante de 2012, où les débats publics permettaient de mieux comprendre des positions souvent très campées et ont permis de faire évoluer le débat. L’éducation comme espace de liberté ou non de propagande pour discuter du bien commun.
J’ajoute les médias, les syndicats et le secteur communautaire comme lieux d’animation et de représentativité d’enjeux humains, communautaires, de justice et d’enjeux environnementaux ont également un rôle à jouer dans ce débat
Même le très conservateur magazine The Economist, dans le numéro récent de son 175e anniversaire, souligne les dérives du néolibéralisme, l’inquiétude croissante des populations et suggère de réviser certains aspects néfastes du capitalisme pour une plus grande justice sociale à travers le monde.
Le bien commun, ça vous inspire quoi ?