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Le souffle de l’Alternative en santé mentale
Louise Guertin – Issu de la troisième vague de désinstitutionnalisation, l’Échelon des Pays-d’en-haut, un centre de jour pour personnes ayant à vivre avec un problème de santé mentale sévère récurrent ou transitoire, célèbre cette année ses 25 ans. Une réussite remarquable.
L’Alternative en santé mentale
Dès l’ouverture en 1993, l’Échelon choisit d’adhérer à l’Alternative en santé mentale, une approche qui donne la primauté à la personne et à des valeurs de respect, d’autonomie, de participation aux décisions. Les intervenants deviennent des accompagnateurs pour permettre aux individus touchés par la maladie de progresser, redonnant le pouvoir d’agir sur son état. On nomme les personnes qui fréquentent l’Échelon, sur une base volontaire, des « entraidants ».
On y applique les principes de gestion autonome de la médication. Les intervenantes, à la demande de l’entraidant, aident à préparer la rencontre avec son psychiatre pour mieux communiquer ses besoins, les effets de la médication ou en connaître les effets secondaires. Pour Mme Ginette Burquel, coordonnatrice de l’Échelon maintenant à la retraite, qui a travaillé 15 ans comme infirmière en santé mentale dans un hôpital, cette approche change la perception des gens face à eux-mêmes, leur donnant une prise sur la démarche de leur mieux-être.
L’aventure
Connaître les étapes de l’essor de l’Échelon permet de mieux apprécier la détermination et l’inventivité des personnes qui ont cru à l’aventure. Suite aux recommandations des rapports Harnois (1987) et Rochon (1988), le gouvernement procède à une troisième vague de désinstitutionnalisation et à la création de ressources communautaires. Des représentants, experts en santé mentale, et trois entraidants créent l’Échelon pour la MRC des Pays-d’en-Haut.
En 1993, l’Échelon s’installe dans un petit local au sous-sol de la maison des jeunes à Sainte-Adèle. Il y a 15 personnes par jour, des pensionnaires des institutions récemment retournés à la communauté.
À la tête du centre de jour, Mme Burquel se donne pour objectif de trouver un local mieux adapté. Dix-huit mois plus tard, l’Échelon déménage au 2e étage de l’Entraide bénévole, rue Principale, à Saint-Sauveur dans une ancienne cordonnerie. Les deux intervenantes (Ginette et Françoise Grignon) avec des amis nettoient, posent les tuiles, peinturent. C’est dans ce « grand » local qu’on instituera les ateliers d’arts avec un artiste bénévole, la cuisine collective et d’autres activités pour resocialiser les entraidants et faire tomber les préjugés.
Mme Burquel explique : « Quand on parle avec ces gens, tu découvres la personne derrière la maladie. Ça aide les gens à reprendre confiance en eux, en leurs habiletés. Ce sont des adultes avec une expérience de vie, plusieurs ont travaillé, ont des enfants, ont un bagage scolaire, du potentiel. On a reçu d’anciens gestionnaires, secrétaire, ingénieur, caissier, etc. Avant d’être malade, ces personnes sont des humains avec un bagage, un potentiel ».
En 1998, avec l’accord du Conseil d’administration, l’Échelon achète une petite maison, rue Principale, à Piedmont. On accueille des citoyens de la MRC, on répond aux appels, on intervient rapidement (pas d’attente pour obtenir un rendez-vous) lorsqu’un entraidant ressent les symptômes précurseurs d’une rechute. On évite l’hospitalisation en aidant à stabiliser la personne dans le besoin. Trois professionnelles font ce travail, incluant la coordonnatrice qui cumule les responsabilités de gestion et d’intervention.
Le projet de logements à prix abordable est né du rêve d’entraidants d’avoir un logement décent, à prix abordable. Embauchée pour planifier la relève de Mme Burquel, Mme Lucie Arcand, travailleuse sociale de formation, y a cru et a piloté le projet avec des bénévoles et la petite équipe (de quatre) de l’Échelon en appui.
Août 2016, l’Échelon déménage dans le nouvel édifice qui abrite également 30 appartements permettant d’y habiter en toute autonomie. Le budget du MSSS a permis d’ajouter deux intervenantes pour appuyer les locataires au quotidien, pour encadrer la vie communautaire. Cette nouvelle étape majeure ajoute au sentiment de sécurité et à l’espoir pour chacun de se réaliser.
L’Alternative à l’efficience
En 2016-17, la fréquentation du centre de jour a augmenté de 41 % avec 2604 interventions. En 2017-18, c’est 3223 interventions, une hausse de 23 % par rapport à l’année précédente.
Mme Lucie Arcand, à la tête de l’Échelon : « C’est un filet de sécurité qui permet aux individus qui le fréquentent de partager, de s’organiser, d’obtenir une rencontre rapide avec une intervenante quand c’est nécessaire. Nous pouvons constater chez les individus qui fréquentent l’Échelon, une réduction significative du nombre d’hospitalisations. »
Coût d’hospitalisation standard : 4 885 $/jour/pers. Selon les données du Réseau communautaire en santé mentale, au Québec « le budget en santé mentale est moins de 6 % des dépenses du MSSS alors que selon l’OCDE les problèmes de santé mentale représentent près du quart de l’ensemble des problèmes de santé d’une population. » Le coût de l’Échelon pour 2017-2018 est de 28,29 $/jour pour l’ensemble des interventions. Le budget de base des organismes comme l’Échelon, non ajusté depuis 2008, est insuffisant.
Le 12 septembre se tient à l’Hôtel Le Chantecler l’événement « Ma différence en couleurs » au bénéfice de l’Échelon des Pays-d’en-haut. Pour acheter ses billets (souper, activités) ou faire un don en ligne au www.echelonpaysdenhaut.com ou en téléphonant au 450-745-0133.