Aller de l’avant

Mathieu Pagé
Les derniers articles par Mathieu Pagé (tout voir)

Mathieu Pagé – « Les municipalités se rendent de plus en plus compte qu’elles subissent ce qu’il y a en amont et que cela a un impact sur qu’il y a en aval »

Informations difficiles à obtenir

L’accès aux données sur les Suivis des ouvrages municipaux d’assainissement des eaux usées (SOMAEU) n’a pas été mis à jour depuis 2013. Ces données, publiques de 2001 à 2013, permettaient à tous les acteurs de l’eau et le grand public d’accéder aux performances des stations d’épurations partout au Québec. Instrumentales dans l’édification du dossier de presse sur la rivière du Nord, ce blocage à l’accès à l’information limite grandement la capacité des organismes et des citoyens de s’informer sur la performance des usines qui assainissent les eaux traitées et les surverses rejetées dans la rivière du Nord.

Dans son article en août 2017, L’accès restreint aux SOMAEU, Jordan Dupuis relatait qu’à la suite d’un échange avec le ministère du Développement durable, l’Environ-nement et la Lutte contre les changements climatiques (MDDELCC), ce dernier l’informait qu’un Atlas électronique serait disponible, mais sans confirmer de date ou d’échéancier. Le Journal a fait le suivi avec le Ministère et affirme que celui-ci est toujours en développement et devrait être complété à l’automne 2018. L’Atlas sera mis à jour annuellement, où on y présentera un sommaire des performances des stations d’épurations, ainsi que leur localisation.

Les données du SOMAEU qui étaient précédemment disponibles au grand public seront dorénavant uniquement disponibles pour les acteurs de l’eau, sur une différente plateforme électronique nommée « Portail des connaissances sur l’eau ».

Le citoyen comme vecteur du changement

Quelques ressources existent pour informer les citoyens tels que Fondation Rivières ou Abrinord qui diffusent une information scientifique vulgarisée sur laquelle les citoyens peuvent s’appuyer. Pour ces organismes, c’est dans le dialogue que l’état de la rivière du Nord pourra s’améliorer.

Lorsqu’interrogé sur l’importance de l’implication citoyenne dans la conservation et la protection des eaux au Québec, Alain Saladzius, président de la Fondation Rivières, a déclaré que : « Le citoyen est le vecteur du changement ». C’est avec conviction que M. Saladzius fait cette affirmation, puisque la Fondation Rivières a émergé d’un mouvement citoyen.

Financement et volonté politique

La volonté politique ne s’invente pas. Pour Alain Saladzius, plus souvent qu’autrement, les élus municipaux sont tout simplement mal ou pas informés sur l’état de la rivière, des solutions existantes ou l’impact du développement urbain sur les cours d’eau. L’initiative citoyenne peut aider à pousser les municipalités dans la bonne direction.

Le président de la Fondation Rivières nous explique aussi que contrairement à la croyance populaire, l’argent ne manque pas nécessairement, il est mal géré. Il considère que plus souvent qu’autrement, des projets seront entrepris après une consultation trop coûteuse et cela sans vraiment évaluer le rendement environnemental de ceux-ci. Les organismes comme Abrinord et Fondation Rivières cherchent justement à établir un dialogue et une diffusion d’information pour permettre aux élus de prendre des décisions éclairées.

Ce problème existe aussi au niveau gouvernemental depuis le changement de compétence entre le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT) et le MDDELCC, qui a été accompagné par un manque de communication entre les deux ministères. D’un côté, le MAMOT a l’argent pour octroyer des subventions pour des projets municipaux et de l’autre, le MDDLCC a l’expertise pour déterminer quels projets auraient le plus grand impact environnemental. Toutefois, le MAMOT subventionne des projets sans nécessairement consulter le MDDLCC. Ceci mène donc à la réalisation de projets coûteux qui, finalement, ne produisent pas de meilleurs résultats.

La Fondation Rivières a identifié le problème dans un rapport sur la rivière Richelieu, publié en 2018 (www.http://fondationrivieres.org/memoires-etudes-et-rapports). Dans le rapport, il est noté que les projets sont généralement évalués à la même échelle, indépendamment de leur rendement environnemental. La fondation recommande que des priorités d’investissement à l’échelle des bassins versants soient instituées pour l’octroi de subventions afin de cibler les interventions les plus pertinentes au maintien de la qualité de l’eau et de l’environnement.

Guide pour les Municipalités

Des outils sont aussi à la disposition des élus municipaux d’après Marie-Claude Bonneville, directrice générale de l’organisme de bassin versant de la rivière du Nord (Abrinord). Elle a confirmé en entrevue que le Rassemblement des organismes bassins versants du Québec (ROBVQ) est présentement à la rédaction d’un guide d’accompagnement pour les municipalités. L’objectif de celui-ci est de présenter les bonnes pratiques utilisées au Québec ou ailleurs dans le monde pour guider les Villes dans la gestion de l’eau. On y retrouvera aussi des exemples de règlements municipaux utilisés dans différentes villes au Québec.

C’est par la concertation et le dialogue que les différents acteurs de l’eau réussiront à améliorer l’état de la rivière du Nord. « Les municipalités se rendent de plus en plus compte qu’elles subissent ce qu’il y a en amont et que cela a un impact sur qu’il y a en aval » affirme Mme Bonneville. Chez Fondation Rivières, on nous confirme que les municipalités commencent à avoir davantage conscience de l’impact qu’elles ont sur la rivière, notamment avec les projets de développement urbain.

Mme Bonneville donne l’exemple de la ville de Saint-Jérôme qui utilise la rivière du Nord comme source d’eau potable; à la fin août, le débit est faible ce qui peut poser problème pour répondre à la demande en eau. L’utilisation d’eau de toutes les municipalités en amont sur la rivière a un impact sur le débit au niveau de Saint-Jérôme.

print