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Levée et lever
Parmi les différentes formes qui finissent les mots, trois peuvent être confondues à l’écrit parce que toutes se prononcent É. Ce sont le formes de l’infinitif des verbes en ER ou leur participe passé en É(s) ou ÉE(s), mais ils terminent aussi des noms, qui en dérivent parfois. Certains reprennent tel quel le ER de l’infinitif, la forme neutre du verbe. Dîner est une activité du soir en France et que sous l’influence du dinner anglais, le Québec effectue à midi, pour souper (supper) en fin de journée. Les exemples abondent, comme dans faire son devoir ou exercer un pouvoir dont les noms proviennent des verbes correspondants.
Mais pour les noms, il existe aussi une finale en ÉE qui évoque une action, une durée, une quantité… Ces mots peuvent être associés à des verbes, comme la levée d’une séance (qu’on lève parce qu’on y était assis sur son séant), levée qu’il ne faut pas confondre avec le lever du soleil ou d’un rideau, où l’on constate l’effet plutôt que de le causer. De même catégorie est la lancée utilisée dans des expressions comme continuer sur sa lancée (poursuivre une démarche) ou effectuer le lancer d’une balle.
Et beaucoup de mots en ÉE insistent sur la durée d’un phénomène autrement désigné plus sobrement : année (an), matinée (matin), soirée (soir), nuitée (nuit). D’autres insistent sur une étendue, une quantité, un peu à la manière de la douzaine issue du chiffre douze. Souvent associées en quelque sorte à un contenant, telles sont assiettée, brassée, chambrée, cuillerée, cuvée, maisonnée, pochetée, poignée, tablée…
Ont aussi cette finale de nombreux noms désignant des plantes, dont ceux qui désignent leurs familles, comme celle des orchidacées (orchidée), les rosacées (rose et pommier), les acéracées (érable)… Mots tous au féminin, comme ces quelques autres nés de participes passés comme l’armée, la chaussée, sans qu’ils aient d’équivalents masculins. Il en existe cependant quelques-uns qui, tout en se terminant en ÉE, sont résolument au masculin : parmi les plus connus, on trouve le trophée (d’origine latine), le mausolée (monument funéraire) ou Morphée, dans les bras masculins duquel on sombre, parce que c’est le dieu grec du Sommeil.
Quant aux noms qui se terminent en É, certains évoquent des groupes ou des institutions (la société, l’université) ; des attitudes ou des sentiments, comme la bonté, la charité, la générosité, la liberté, la pitié, sans avoir de verbes correspondants : personne ne « bonte », ni ne « générosite ». D’autres proviennent d’un participe passé, comme le marié (par rapport à la mariée) ; ou comme les noms issus de l’infinitif, qui n’ont pas d’équivalent féminins, comme le cuirassé (navire), le passé.
Mais gardons-nous de penser que l’été, malgré l’expérience que nous en faisons chaque année, proviendrait du verbe être pour nous inciter à croire que sa principale définition est celle d’avoir été, de passer sans qu’on ait le temps de vraiment s’en apercevoir. Profitons-en plutôt !