Appel à la conscience

Diane Brault
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Un plaidoyer pour le respect des arbres

Diane Brault – La vie secrète des arbres de Peter Wohlleben, un formidable récit et plaidoyer pour le respect des arbres au même titre que la vie animale.

Ce livre nous permet de nous approprier la connaissance sur les arbres et leur habitat, là « où pullule une vie très mal connue ». Wohlleben nous rappelle que l’espèce humaine fortement urbanisée est maintenant très tôt coupée de la véritable vie du monde végétal. Grâce au talent de conteur de Wohlleben, des notions scientifiques ardues deviennent intéressantes et compréhensibles pour tous.

Légèrement anthropomorphique, son écriture fait appel aux émotions. Par exemple, il illustre la façon dont les arbres respirent, goûtent et aiment vivre ensemble, interreliés par leur système racinaire et associés aux champignons qui fabriquent des réseaux de microfibres. Les arbres peuvent communiquer par ce système analogue à celui d’internet. Ils échangent entre eux des informations et des nutriments essentiels à leur survie de groupe. N’oublions pas qu’ils sont des êtres vivants aux besoins complexes au départ et que l’on tue sans trop s’en soucier pour satisfaire nos nombreux besoins.

Peter Wohlleben est un forestier allemand qui a été amené, au début de sa carrière, à abattre des arbres centenaires et à pulvériser des « pesticides » (nom générique pour décrire insecticides, fongicides, herbicides, parasiticides) sur des hectares de forêt d’État. Dégoûté de cette façon de faire qui va à l’encontre même du processus de reproduction normale et du développement sain pour la forêt, il a fait un virage radical vers des approches alternatives.

On comprend, à travers ce qu’il a écrit, qu’il dénonce la maltraitance générale faite aux arbres et à leur environnement. « Quand on sait qu’un arbre est sensible à la douleur et qu’il a une mémoire, que des parents-arbres vivent avec leurs enfants autour d’eux, on ne peut plus les abattre sans réfléchir ni ravager leur environnement en lançant des bulldozers à l’assaut des sous-bois. »

Aujourd’hui, ce forestier écrivain dirige une forêt publique de 1200 hectares. Aucun pesticide, aucune machinerie. Cette forêt pousse à l’état sauvage. Seuls les chevaux sont utilisés. Cette forêt a retrouvé sa diversité, sa santé et elle produit de façon aussi rentable, mais sans épuiser ou détériorer le sol comme le fait la monoculture sylvicole intensive. D’après Wohlleben, « la vie des arbres est d’une trop grande complexité et importance pour que l’humain s’en mêle ».

D’après des recherches, la société des arbres fonctionne au contraire de ce que la sylviculture prétend. Elle fonctionne sur la coopération et l’entraide dans un quotidien lent et sur un très long terme et non sur un mode individualiste, compétitif et de performance à l’image de nos sociétés contemporaines. Les arbres sont programmés génétiquement pour vivre longtemps ensemble, beaucoup plus longtemps que l’homme (au-delà de 120 ans). Les plus âgés freinent « volontairement » la croissance des plus jeunes, car pour eux et pour le groupe une croissance plus lente sera gage de longévité.

Ce livre est passionnant et laisse transparaître la sensibilité et le respect du forestier-écrivain au service de la nature. Ce livre est un appel à la conscience.

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