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Aux papas qui s’émerveillent!
Françoise Nicolas
Comme des milliers de personnes intéressées au 375e de Montréal, le 21 mai dernier, j’ai suivi la parade des Géants, de leur réveil après la sieste, à 14 heures, Place des Festivals, jusqu’à la cérémonie de leur départ, à 15 h 30, près du métro Beaudry. Comme des milliers de spectateurs, j’ai admiré l’oncle Scaphandrier ainsi que sa nièce, la Petite Géante, et le chien, Xolo. Encore émerveillée par la qualité des marionnettes, le talent des créateurs et l’implication des techniciens, j’observais l’animation dans le parc lors de la cérémonie du départ. Le long de la barrière de sécurité, la première rangée était principalement constituée de femmes et d’enfants. Beaucoup d’hommes composaient le deuxième et troisième alignement. Je me situais dans la quatrième ligne. Tous debout, dans un état de réjouissance et de curiosité, nous scrutions le ciel, là où se déroulait maintenant l’activité. Au loin, nous entendions des ordres. La grue venait de soulever de son socle l’oncle Scaphandrier et, après une autre manœuvre de l’opérateur, mon oncle fut suspendu dans le vide au bout de la flèche. Le ciel bleu était occupé par une majestueuse masse brune retenue par des câbles. Une œuvre impressionnante. Après une autre opération du grutier, mon oncle fut placé au-dessus d’un conteneur stabilisé verticalement, ses portes étant ouvertes vers le ciel. Les techniciens ajustèrent la position de mon oncle à la verticale au-dessus du gouffre. Puis mon oncle descendit doucement et ses pieds disparurent dans la gueule ouverte de la caisse métallique. Progressivement, ses mollets, ses genoux, ses cuisses et son bassin sombrèrent dans le ventre du container. Il ne restait de visible dans le ciel que son torse, ses épaules et sa tête. C’est à cet instant précis qu’une émouvante réaction eut lieu. Alors que les enfants de la première rangée regardaient bouche bée le ciel et que les mères souriaient de béatitude, les hommes de la deuxième et troisième ligne levèrent leurs bras et firent un signe d’adieu à l’oncle Scaphandrier. Ces secondes furent suspendues dans le temps. Un silence total s’imposa dans les rangs. Puis le torse, les épaules et la tête de mon oncle disparurent. Par la suite, les portes se refermèrent et le conteneur pivota horizontalement sous les applaudissements. Puis ce fut au tour de la nièce, la Petite Géante. Les techniciens l’habillèrent avec un capuchon et un chapeau de pluie de couleur jaune avant qu’elle n’affronte les tempêtes de l’Atlantique. Là encore, quand la Petite Géante passa pour la dernière fois devant nous, brassée par une mer houleuse, les bras des hommes se levèrent et ils firent un signe d’adieu. Certains ajoutèrent : « Au revoir ».
Un bon père, certes, c’est celui qui nourrit son enfant. Celui qui met du pain sur la table. Un bon père, bien sûr, c’est celui qui éduque. Celui qui initie aux valeurs. Un bon père, évidemment, c’est celui qui offre du temps. Celui qui va au parc, qui répare la bicyclette, qui fait du camping. Un bon père, assurément, c’est celui qui accompagne. Celui qui fait qu’une relation de confiance existe. Un bon père, bien entendu, inculque les assises de la réalité. Mais aussi, un bon père, c’est celui qui donne accès à son enfant à la vie imaginative. Celui qui soutient le rêve, qui est le porteur de symboles, qui est l’assistant de la créativité, qui est le metteur en scène de la projection. Un bon père, c’est celui qui transmet à son enfant la capacité de s’identifier à un personnage, masculin et féminin ou animal. Celui qui se laisse émouvoir par l’oncle Scaphandrier, la nièce, la Petite Géante, et le chien, Xolo. Un bon père, c’est celui qui sait dire au revoir à son enfant. Celui qui lui permet de voguer. Un bon père, c’est d’aider son enfant à réaliser son œuvre. Sa vie.