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Le Trio Lajoie, en symbiose et en synergie
Gisèle Bart – Ce 17 septembre dernier, toujours à Prévost, c’est le Trio Lajoie qui ouvrait la saison 2016-17 de Diffusions Amal’Gamme. Ce trio est composé de trois musiciennes aux parcours impressionnants, la violoncelliste Julie Hereish, la pianiste Akiko Tominaga et la violoniste Ariane Lajoie.
Symbiose : Association étroite de différents organismes. – Synergie : Association d’éléments concourant à la potentialisation maximale les uns des autres. – Potentialisation : Augmentation des effets d’un élément de par l’action d’autres composants.
C’est ainsi que je qualifierais le jeu de ces trois musiciennes, énergiques autant que sensibles, au talent solide, chacune individuellement au meilleur de sa forme et en totale possession de son art, vouées à l’exécution la plus parfaite possible des œuvres choisies parmi celles de grands compositeurs, et ce, en un ensemble impeccable. Leur premier choix fut de Ludwig Van Beethoven, le Trio no 3 en do mineur, op.1. Beethoven l’avait exécutée en présence d’un Haydn déboussolé qui en avait prédit l’insuccès, la qualifiant de choquante et déstabilisante. Que de beauté, ce son limpide du piano où couraient des doigts véloces pendant que, solennelles et saccadées tout à la fois, les cordes passaient de l’impétuosité au bercement. Puis, gravité, introspection, le modernisme pointa son nez. C’est la fin du XVIIIe siècle. La Révolution française a eu lieu, la tête de Louis XVI est tombée et c’est un des orages omniprésents dans l’œuvre de Beethoven qui vint clore l’opus, avec abondance de trilles cristallins au piano. Des larmes? La pluie?
En deuxième partie du programme, passer de Beethoven (1770-1827) à Bohuslav Martinu (1890-1959) démontra la grande versatilité du Trio Lajoie. Martinu, un Tchèque né en Bohème, vécut à Paris et à New-York. C’est dire l’éclectisme de son inspiration. Dans les Cinq pièces brèves, Trio no.1, H193 datées de 1931, demi-tons, saccades, économie de notes au piano, nous voici bien ancrés dans le XXe siècle. La deuxième pièce fut Trio no 2 en ré mineur, H327 toujours de Martinu. Celle-là de 1951, écrite huit ans avant son décès, fut annoncée comme « une pièce difficile, très exigeante pour un pianiste ». À l’un des mouvements, le piano y est effectivement violenté. Puis il se termine par une note prolongée du violon et du violoncelle en un ensemble impressionnant. Au dernier mouvement, fluidité du piano, c’est une course vive formidablement soutenue par les cordes. Un moment d’accalmie, plus mélodieux, plus mélodique, nous permit de reprendre notre souffle. Puis, cette pièce virulente, vitesse du siècle où fut inventée l’automobile, pièce où apparut une violoniste plus solide que jamais, se termina par d’ultimes accords de cordes pendant que tombaient une à une, espacées, des gouttes de piano.
Pour boucler la boucle, le Trio Lajoie avait sélectionné une pièce de Haydn dont le petit grain de folie rejoignait parfaitement celui de Martinu, pourtant éloignés de deux siècles l’un de l’autre.
Comme d’habitude, l’exceptionnel public de la salle St-François- Xavier de Prévost démontra son appréciation de connaisseur en applaudissant ce Haydn aussi chaleureusement qu’il l’avait fait auparavant pour Martinu et pour Beethoven ainsi que bien sûr pour les talentueuses exécutantes du Trio.