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La rivière du Nord est précieuse pour la région sans l’ombre d’un doute. Elle contribue à la survie de nos écosystèmes, elle offre aux communautés qui la longent des paysages féériques et sert d’attraction importante de villégiature. Ce 12e dossier sur la rivière offre un aperçu des développements affectant le bassin versant de la rivière du Nord durant la période 2015-2016.
Approbation du Plan directeur de l’eau
Le dossier du Journal de 2013 a couvert le lancement du plan directeur de l’eau (PDE) d’Abrinord, l’organisme responsable de la gestion intégrée de l’eau dans la zone du bassin versant de la rivière du Nord. Ce plan présente un diagnostic de la gestion du bassin versant de la rivière à partir des résultats obtenus entre 1988 et 2012 et propose un plan d’action pour en assurer une gestion efficace. Le plan a été rédigé et publié 2013, mais ce n’est qu’en 2015 qu’il fut approuvé et officialisé par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs et neuf autres ministères. Cela permet à Abrinord d’obtenir les subventions nécessaires pour le mettre en œuvre et en plus de donner plus de crédibilité au projet.
Selon le PDE, le problème numéro 1 affectant la rivière est celui des coliformes fécaux. La bonne nouvelle est que depuis l’an 2000, on observe une nette diminution de la concentration de coliformes fécaux dans la rivière du nord. Et après 2012? Difficile à dire, les échantillonnages ne sont faits qu’aux mois et la concentration de coliformes fécaux fluctue énormément en fonction des pluies, de la température, de la croissance démographique et de plusieurs autres facteurs hors du contrôle des scientifiques. Difficile donc d’identifier des tendances générales sur des courtes périodes avec ces données.
Aucune amélioration perceptible
Isabelle Marcoux d’Abrinord veut être très prudente avant de donner un diagnostic sur une si courte période de temps, la rigueur scientifique l’impose. Tout de même, aucun changement notable au cours des dernières années n’est perceptible. Les résultats de l’organisme pour l’année 2015 montrent que 65 % des stations d’échantillonnage ont enregistré au moins un résultat supérieur au critère de concentration de coliformes fécaux de 1000 UFC/100 ml. Notons également qu’à partir de 200 UFC/100 ml, les contacts directs avec l’eau sont déconseillés. Des résultats inquiétants considérant l’utilisation qui en est faite.
La Fondation Rivières (FR), un organisme à but non lucratif également impliqué dans la préservation de la rivière du Nord, porte un diagnostic similaire à Abrinord et voit cela d’un bien mauvais œil. « Ces bilans s’avèrent toujours aussi négatifs puisqu’aucune amélioration perceptible n’a été observée au cours des quatre dernières années », mentionne le communiqué de la fondation du 16 mars 2016, « à Saint-Jérôme, nous avons même comptabilisé plus de débordements sur la période 2012-2015 que dans notre étude précédente (2008-2011) ».
Les débordements, première source du problème
Alain Saladzius, cofondateur et président de FR, explique que ces débordements d’eaux usées sont la première source de contamination fécale dans la rivière, « Les stations d’épuration vont bien, mais les eaux usées débordent en chemin. Ça ne se rend pas à la station d’épuration ». Ces débordements sont beaucoup plus fréquents en temps de pluie, lorsque le volume d’eau passant dans le système est beaucoup plus important. Mais la fondation se désole de constater des débordements en temps sec à certains ouvrages des villes de Saint-Jérôme, de Brownsburg-Chatham et de Saint-Sauveur. Cette dernière en enregistre d’ailleurs un nombre impressionnant de cinq en 2015. Un seul débordement en temps sec est une violation du règlement sur les ouvrages municipaux d’assainissement des eaux usées, cinq débordements, c’est une violation de tout bon sens.
Le Journal souhaitait obtenir plus d’information sur ces débordements en temps sec à Saint-Sauveur. Quelle en est la cause et quelles solutions seront apportées ? Malheureuse-ment, après avoir parlé au maire Jacques Gariepy, au directeur général Jean Beaulieu et à Normand Patrice de la Régie de l’assainissement des eaux usées de Piedmont/Saint-Sauveur, nous demeurons toujours ignorants sur la question… tout comme ces gens apparemment. Il est tout de même encourageant de constater qu’aucun débordement en temps sec n’a été observé cet été à Saint-Sauveur.
Améliorations locales
Le bilan n’est heureusement pas seulement négatif. Même sans amélioration générale pour la rivière, certaines municipalités font des grands efforts et obtiennent des résultats. M. Saladzius note d’ailleurs le progrès fait par deux municipalités. « À Sainte-Agathe, ils ont investi beaucoup et ont beaucoup réduit leurs débordements […] et à Sainte-Adèle ils ont rénové leur station, il s’agit de travaux de plusieurs millions » dit-il. Bien que locales, ces améliorations sont bien réelles. Ce sont d’ailleurs les investissements de Sainte-Agathe qui ont permis la réouverture de la plage de Val-Morin après neuf ans de fermeture.
Il faut continuer à faire des efforts
Ces accomplissements sont encourageants, mais il faut prendre garde de ne pas s’endormir sur ses lauriers. « Il faut continuer à faire des efforts pour ne pas perdre ce qui a déjà été fait. Les grands investissements qu’ont faits certaines municipalités ne vaudront pas grand-chose si l’on arrête les efforts », affirme Alain Saladzius.
Selon lui, une première avenue pour limiter les débordements et diminuer la concentration de coliformes fécaux est d’assurer une meilleure gestion des eaux de pluie. Une manière d’y parvenir est de diminuer les grandes surfaces imperméables telles que les stationnements. « Il faut que l’eau s’infiltre dans le sol pour que ça diminue la quantité d’eau qui va directement dans les égouts en temps de pluie », dit-il. En diminuant la quantité d’eau qui passe par les égouts, les villes peuvent diminuer le risque de débordements en temps de pluie, ce qui constitue la très grande majorité de débordements. « Il y a des fonds disponibles au gouvernement pour les infrastructures », continue le président de la fondation. Les pièces sont donc en place. Il ne suffirait que d’une volonté politique suffisante pour susciter des efforts pour une meilleure gestion de l’eau.
Solidarité le long de la rivière
Du côté d’Abrinord, c’est précisément cette volonté politique qu’on essaie de susciter. Il s’avère par contre que cette volonté politique ne va pas nécessairement de soi. Les villes concernées sont toutes liées par la rivière du Nord. Elles affectent les villes en aval par leurs actions et sont à leur tour affectées par les actions des villes en amont. Le problème est que ces municipalités ne subissent pas directement les conséquences de leur mauvaise gestion et qu’il est alors facile d’ignorer les problèmes. Souvenons-nous d’ailleurs qu’il a fallu que Guy Drouin et l’Association de riverains du lac Raymond se donnent corps et âme pour que Sainte-Agathe et le gouvernement du Québec agissent et règle le problème des débordements.
« On essaie de créer une solidarité amont-aval », dit Isabelle Marcoux. Marie-Claude Bonneville, coordonnatrice chez Abrinord renchérie avec l’exemple de la ville de Val-Morin, « ayant compris l’impact qu’ont les villes en amont sur eux, ils comprennent aussi que leurs actions affectent les villes en aval et sont maintenant beaucoup plus proactives. Ils ne se contentent pas de régler les problèmes qui les affectent, ils mettent aussi en place des actions pour s’assurer qu’ils ne causent pas de problème chez les autres ». C’est donc en obtenant de plus en plus d’information sur la rivière et son bassin versant, en partageant cette information, en sensibilisant les municipalités et en encourageant le dialogue et la collaboration entre tous les acteurs concernés qu’Abrinord tente d’éveiller cette solidarité au sein des communautés longeant la rivière du Nord.