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Jean Massé – À ce jour, six méthodes ont été principalement utilisées pour contrôler la prolifération du myriophylle à épis (MAÉ) dans les lacs : les herbicides, les barrières benthiques (tapis perméables), le fauchage, la baisse du niveau de l’eau, le contrôle biologique avec les charançons et l’arrachage.
Les herbicides (2-4D[1] et Diquat[2]) ont surtout été utilisés en Europe et en Amérique du Nord durant les années 1970 à 1990. Leur usage n’a pas réussi à éradiquer le MAÉ en plus de soulever des problèmes toxicologiques. Aujourd’hui, au Québec, l’emploi du 2,4 D fait l’objet de restrictions importantes et nécessite une demande d’autorisation spéciale auprès du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de Lutte contre les changements climatiques[3].
En ce qui a trait aux barrières benthiques, on en dénombre trois types : la jute biodégradable, la fibre de verre et le géotextile. Ces tapis perméables sont installés sur le fond de la zone littorale du lac touché par le MAÉ et immobilisés avec des pesées (sacs de sable, roches, blocs de béton,…) ou des pieux. Ce recouvrement empêche la croissance de la plante de manière mécanique en entravant le déploiement des tiges et de manière bioénergétique en la privant de la lumière qui la fait croître. La jute demeure la méthode la moins coûteuse à court terme (0,85 $ à 1 $ le m2 – durée de vie utile d’un an) mais la plus dispendieuse à long terme comparativement au géotextile (1,40 $ le m2 – 4 à 7 ans) et à la fibre de verre (7,50 $ le m2 -15 ans). La jute peut demeurer en place et être remplacée d’année en année puisqu’elle est biodégradable. Pour les deux autres matériaux, ils doivent être enlevés à la fin de leur vie utile puisqu’ils ne se décomposent pas. Il y a plusieurs lacs du Québec dans lesquels la jute a été utilisée pour lutter contre le MAÉ, dont le lac Pemichangan dans l’Outaouais et le lac Lovering en Estrie. Dans les deux cas, les résultats ont été positifs mais nécessitent une intervention et un suivi sur plusieurs années[4].
Pour ce qui est du fauchage, la méthode consiste à couper les tiges avec une machinerie spécialisée (faucardeuse) ou au moyen d’un appareil mécanique monté sur une barque (couteau mécanique) ou encore d’un outil manuel (râteau). Ce procédé est controversé et ne donne pas les résultats escomptés. En effet, comme les tiges sont coupées et non déracinées, la plante repousse. Et c’est sans compter sur la propagation du MAÉ, car le mode principal de reproduction de cette plante s’effectue par la fragmentation de la tige.
Dans le cas de la baisse du niveau de l’eau, la technique consiste à abaisser le niveau d’eau du lac de manière à ce que le MAÉ soit éliminé par le gel hivernal. Cette méthode nécessite la présence d’un ouvrage de rétention des eaux et a pour inconvénient majeur de tuer non seulement le MAÉ mais aussi toutes les plantes aquatiques du lac ainsi que sa faune.
Contrôle biologique insuffisant
Le charançon est un insecte aquatique indigène dont la larve se nourrit du MAÉ. Son utilisation a produit des résultats décevants notamment au lac Supérieur dans les Laurentides[6].
La méthode de l’arrachage consiste à extraire la plante des sédiments avec ses racines de façon à éviter la repousse. Cette technique nécessite l’utilisation de plongeurs et requiert une attention toute spéciale pour recueillir tous les fragments produits lors de l’opération qui peut s’avérer coûteuse si le bénévolat fait défaut. Cette approche a été utilisée au lac Laurel dans la municipalité de Wentworth-Nord avec un certain succès[7]. L’arrachage a permis de stopper la progression du MAÉ dans la petite zone traitée (500 m2) et même de la réduire, mais cette opération doit être répétée annuellement pour éviter toute progression.
En conclusion, il n’y a pas de solution miracle pour éradiquer le MAÉ. Dans de telles conditions, on va plutôt privilégier les interventions dans des zones du lac où l’on souhaite conserver une accessibilité à l’eau (plage, marina, prise d’eau…). Il est à noter que toutes ces interventions requièrent une autorisation du MDDELCC. De plus, le ministère a créé le programme Sentinelle qui permet aux citoyens de signaler la présence de plantes aquatiques exotiques envahissantes (PAEE) présentes dans leur environnement. En accédant au site www.mddelcc.gouv.qc.ca/biodiversite/ , il est possible de faire ce signalement et aussi de consulter le répertoire des PAEE connues et présentes sur le territoire québécois.
1. 2- 4D: désherbant qui agit comme une hormone de croissance sur les plantes ce qui entraîne leur mort. Il est classifié comme un perturbateur endocrinien (système hormonal) ou suspecté de l’être, selon les pays.
2. Diquat : herbicide qui agit comme défoliant. Les agents oxydants qu’il forme attaquent les membranes des cellules végétales et entraînent la mort de la plante.
3. www.ville.sainte-agathe-des-monts.qc.ca
4. www.abv7.org/administration/content
www.laclovering.org/images/download/Rapport_Mikael_Cote.pdf
6. www.archipel.uqam.ca/2790/1/M11280.pdf
7. Lutte au myriophylle à épis, dont le cas du lac Laurel. Présentation d’André-Philippe Hébert et Denise Cloutier, 4 juillet 2015, journée de la famille à Sainte-Anne-des-Lacs.