Les Jardins du précambrien de Val-David
L’américanité, thème du Symposium 2015

Avant tout artiste de performance, Giorgia Volpe a surpris les invités, jouant le rôle de la Déesse de l’eau d’érable. Elle a ainsi marché dans les sentiers des Jardins du précambrien, habillée d’un habit qu’elle a fabriqué à partir de tubulures servant à recueillir l’eau d’érable. Cette performance de l’artiste s’est avérée un avant-goût de son installation, nommée Hospedeira. Elle a tissé une série de hamacs à l’aide de tubulures qu’elle a récupérées. À la fois brésilienne et québécoise, Giorgia Volpe considère le métissage tout à fait à l’image de l’américanité et c’est le jeu de mots entre « tissage » et « métissage », qui lui a inspiré son œuvre.

Pour souligner les 20 ans des Jardins du précambrien, sept artistes en arts visuels d’ici et d’ailleurs ont été invités à créer une œuvre inspirée du thème de l’américanité. Un prolongement du sentier d’un demi-kilomètre a été aménagé afin d’héberger les créations multidisciplinaires du Symposium 2015.

Le 11 juillet dernier avait lieu l’inauguration officielle du Symposium international d’art-nature 2015. La commissaire Andrée Matte, la directrice générale Marie-Claude Cossette et le fondateur et directeur artistique René Derouin ont prononcé quelques mots. Le président d’honneur était le Consul général du Mexique, M. Francisco Del Rio. Il s’est dit très heureux de la belle relation établie et entretenue des années durant entre M. Derouin et le Mexique. M. Derouin a d’ailleurs déclaré : «L’art n’existe pas sans public, je l’ai appris lors de ma formation artistique mexicaine». Après la traditionnelle coupe du ruban, la saison 2015 des Jardins a été annoncée officiellement ouverte. Une conférence de M. Jean-Paul l’Allier a suivi la visite du Symposium 2015.

La signification de l’œuvre de Joëlle Morosoli était particulièrement poignante. Intitulée L’érosion des peuples, il s’agit d’une installation cinétique; en effet, tout un système souterrain permet d’activer les balanciers (les cou-teaux), sur simple pression d’un bouton. Au fil du temps, la corde s’amenui-sera de plus en plus, avec le mouvement des couteaux. Cette corde représente la culture amérindienne, tandis que les couteaux se veulent les cinq pays conquistadors des Amériques. La création de Joëlle Morosoli illustre donc à quel point les nations conquérantes ont affecté les Amérindiens jusqu’au plus profond de leur être. Malgré cela, l’artiste fait remarquer que la base de son œuvre est en acier inoxydable, signifiant ainsi que le cœur même de l’améri-canité demeure inaltérable.

Un regard réfléchi sur l’Amérique

Présents pour l’occasion, les sept artistes en arts visuels, le compositeur québécois Alain Lalonde et le poète Jean-Paul Daoust ont présenté leurs créations aux invités. La réflexion rattachée à l’œuvre de Richard Purdya retenu notre attention. Originaire des Laurentides, l’artiste a réalisé une œuvre réfléchie, qui critique l’individualisme américain. En fait, c’est une expérience qu’il a vécue il y a quelques années, qui lui a inspiré le concept de sa création. En 2013, Richard Purdy a réalisé un projet de photographie : il a choisi plusieurs tableaux de peintres québécois, qui ont été réalisés au cours du 19e siècle; puis, il a retrouvé les endroits où ces paysages ont été peints. Son but était de photographier ces sites, afin de les comparer avec les tableaux originaux.

« Ce n’était pas toujours facile… Le projet est devenu de plus en plus difficile, plus j’approchais la frontière américaine », explique Richard Purdy, qui a parcouru le nord et l’est du Québec à la recherche de ces endroits devenus célèbres. Sur son chemin, il s’est notamment heurté à une propriété privée : une grande maison entourée de clôtures. Il a sonné à la porte et le propriétaire lui a refusé l’accès à sa propriété pour qu’il puisse y prendre sa photographie. Richard Purdy était alors sous le choc : « Le tableau est exposé au Musée des Beaux-Arts à Ottawa et des centaines de personnes le contemplent chaque jour, mais le site où il a été réalisé est la propriété d’un seul homme, qui ne connaît même pas son existence.»

Richard Purdy a alors décidé d’ériger une imposante clôture en bois massif dans les sentiers des Jardins du précambrien. Autour de cette clôture, l’artiste a déposé des pièces de casse-tête en très grande quantité, symbolisant les paysages et les vies brisées par l’individualisme.

Très originales, toutes les œuvres se veulent un hommage à l’Amérique dans son ensemble, et sont lourdes de sens. Chacune d’entre elles a été conçue pour bien vieillir dans la nature, afin qu’elles puissent être encore exposées l’an prochain.

Le financement: un défi nécessairepage24_c

Cette année, l’organisme a dû s’adapter à une importante coupe budgétaire : résultat de l’abolition de certaines subventions. Le Programme pour les arts et les lettres des Laurentides, une entente régionale entre la CRÉ, le CLD et le Conseil des arts et des lettres, n’a pas été reconduit, représentant un manque à gagner de 15 000 $ dans le budget annuel des Jardins du précambrien.

 

Fragilisé par ces coupes budgétaires, l’organisme a dû réduire les heures d’ouverture et faire appel à des bénévoles pour entretenir les sentiers. « Le financement sera plus difficile, il va falloir être créatif », souligne la directrice générale, Marie-Claude Cossette. Elle précise que l’organisme devra s’éloigner de plus en plus du financement public pour se tourner vers le financement privé. La fondation des Jardins du précambrien a notamment lancé une nouvelle campagne de financement, nommée Les amis du précambrien, afin de créer un cercle d’amis qui les aideront à poursuivre leurs activités.

Pour plus d’informations sur le calendrier des événements, rendez-vous au www.jardinsduprecambrien.com

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