À quoi pourrait servir notre rivière?

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Dans le passé, la rivière du Nord a servi à amener les premiers colons, puis à flotter le bois et produire l’énergie pour nos usines. Dans les années cinquante, c’était devenu un égout, un dépotoir; l’entrepreneur qui faisait la collecte des déchets à Prévost avait son dépôt dans une coulée à la tête d’un rapide et il poussait les ordures dans le courant avec son tracteur.

La rivière changeait de couleur à l’usine de la Rolland à Mont-Rolland, le tannin et les résidus de traitement de la pulpe lui donnaient une belle couleur café. À Sainte-Agathe, c’était l’usine de tapis qui rythmait les couleurs, selon qu’on y fabriquait du rouge, du bleu, ou du vert. Je me souviens de l’avoir vu turquoise comme une rivière des Rocheuses, c’était joli, mais les pois-sons qui flottaient le ventre en l’air ne s’y étaient pas fait prendre. Au vingt et unième siècle, nous devrions avoir une autre approche que celle d’asservir une ressource d’une telle valeur uniquement à des intérêts économiques à court terme. Partout dans le monde civilisé, une belle rivière comme la nôtre ferait l’objet d’un plan de revitalisation pour qu’elle devienne le moteur économique de sa région.

La vie c’est quoi? De l’air pour respirer, de l’eau sans coliformes pour boire, de la nourriture saine pour rester en vie et en santé. Lorqu’on nous dit qu’on est pauvre, que tout est foqué, on ne pense sûrement pas aux pays vraiment pauvres où tout manque et où on peut marcher sur une mine ou se faire tuer en allant au marché acheter pour quinze roupies de viande avariée. Nous avons plus de moyens et de ressources que ça. Ce qui serait normal chez nous, ce serait d’avoir des poisons dans la rivière, des arbres dans la forêt et des montagnes qu’on peut regarder sans voir des condos partout. Pendant des années nous nous sommes fait promettre que la richesse viendrait avec des usines, des centrales électriques, des moulins à scie, des hôtels, des condos. À ce rythme, aujourd’hui, nous devrions tous être millionnaires; les usines sont arrêtées, les condos sont vides, on nous menace de monter le prix de l’électricité pour payer nos dettes. Où est allé le cash, promis ? Où sont nos vingt-deux millions investis à Tremblant, qui va les rembourser lorsque ce sera vendu ? Combien d’argent va-t-il encore falloir ajouter dans ce projet ? Il est temps d’inves-tir dans le vrai développement dura-ble. Avant d’enlever l’eau dans le rapide pour faire marcher des turbines, peut-être faudrait-il s’assurer qu’elle ne contient pas trois mille coliformes par millilitre. Juste au sud de la frontière, dans l’État de New York une petite rivière comme la nôtre, la rivière Trout, a été nettoyée et est devenue un paradis pour les pêcheurs qui viennent de partout dans le monde et laissent chaque année une soixantaine de millions à la région de Trout River.

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