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Sommes-nous en train d’assister, impuissants, au pire affront environnemental que le Québec n’ait subi?
Considérant que la carte de distribution des permis d’exploration de gaz de schiste chevauche presque exactement le maigre 2 % de notre territoire dédié à l’agriculture, l’idée de voir nos meilleures terres agricoles polluées et accaparées par une multitude de puits de gaz de schiste est extrêmement inquiétante. C’est notre patrimoine agricole, déjà mal en point et une grande partie de notre sécurité alimentaire actuelle et future qui sont en jeu. Aujourd’hui, une question se pose : est-ce que les pompeurs et vendeurs de gaz et de pétrole sont au service de la société ou si c’est la société qui est à leur service ?
Il n’y a pas si longtemps, l’idée d’extraire du pétrole des sables bitumineux était complètement farfelue. Ce pétrole serait trop coûteux et son extraction trop polluante. L’or noir se faisant rare, aujourd’hui la « faim » justifie les moyens !
Il faut savoir que les compagnies pétrolières albertaines ont besoin de près d’un milliard de pieds cubes de gaz naturel par jour, pour extraire et conditionner le pétrole des sables bitumineux. C’est là qu’entre en jeu le gaz de schiste, car la production des puits classiques de gaz naturel, comme les puits de pétrole, est en sérieux déclin.
Selon des chercheurs de l’Université Cornell aux États-Unis, l’addition de l’exploration, de l’extraction et de la combustion du gaz de schiste aurait une empreinte écologique supérieure à celle du charbon! « Le gaz de schiste est à l’industrie du gaz naturel ce que les sables bitumineux sont à l’industrie du pétrole, c’est-à-dire beaucoup plus “sale” à extraire. » (Tyler Hamilton, Thestar.com, Université McGill)
Le forage et la fracturation d’un puit de gaz de schiste requièrent l’injection de plus de 10 millions de litres d’eau mêlée à du sable et à des produits chimiques toxiques, dont certains sont des perturbateurs endocriniens. Les puits de gaz de schiste doivent être fracturés plusieurs fois pour maintenir la production. Ce procédé appelé hydro fraction sert à fissurer le schiste pour en libérer le gaz. Chaque fois, il y a des risques de libération de gaz dans l’air, dans le sol et dans les puits d’eau avoisinants.
Sachez que 10 millions de litres d’eau équivalent à la consommation quotidienne de 28,000 québécois. Depuis quelque temps, des milliers d’entre nous font face à des restrictions sévères de consommation d’eau et le fleuve Saint-Laurent atteint des records historiques de bas niveau. Mais où donc ces compagnies ont-elles puisé toute cette eau, depuis que l’exploration a commencé en catimini depuis on ne sait quand ? Ces forages se font dans des régions (Lotbinière, Montérégie) déjà affligées par la précarité de l’approvisionnement en eau potable.
Après l’hydro fraction, on extrait la boue de forage contaminée qui est alors stockée dans des bassins de décantation ou acheminée par camion vers des usines censées s’en débarrasser correctement. Aux États-Unis, il y a eu des centaines de constats d’infractions concernant des bassins inadéquats et des déversements dans des cours d’eau.
Ceux qui ne sont pas d’accord avec le sort réservé à l’environnement dans cette filière, se font accuser d’immobilisme. Mettre tous ses œufs dans le panier des combustibles fossiles sans égard à l’environnement serait pour plusieurs pire que l’immobilisme, un véritable pas en arrière. Vivement un moratoire (à suivre) !