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Bruno Montambault, août 2008 – Les cyanobactéries sont sur toutes les lèvres. Les médias, les municipalités et le gouvernement en parlent tellement que le problème des algues bleues éclipse parfois des dangers beaucoup plus réels pour la santé publique, tels les coliformes fécaux, par exemple. Et il apparaît que la rivière du Nord soit bien fournie de ces micro-organismes.
Les coliformes fécaux, comme les entérocoques et les streptocoques fécaux, sont des indicateurs utilisés par la santé publique pour déterminer si l’eau est contaminée. Ces micro-organismes sont toujours présents dans l’eau de nos rivières et de nos lacs : après tout, nos cours d’eau ne sont pas stériles ! Mais quand leur présence atteint certains niveaux (voir tableau), les activités récréatives peuvent être compromises et, pire encore, la santé des gens peut parfois être en danger.
Selon les explications du docteur Michel Savard, médecin-conseil en santé publique pour la direction des Laurentides, « ce n’est pas tant le niveau de coliformes, mais le type de coliformes qui importe. » Donc, ce ne sont pas tous les types de bactéries d’origine fécale qui sont dangereux. Mais s’il y a présence de coliformes fécaux dans l’eau, il y a avec certitude présence d’autres agents microbiens qui, eux, peuvent être très dangereux pour la santé. D’où l’intérêt d’avoir le niveau de coliformes fécaux comme indicateur de la qualité de l’eau. Le plus souvent, les bactéries provenant des selles peuvent engendrer des problèmes gastro-intestinaux, mais aussi des otites, des conjonctivites et des infections cutanées. Dans les pires des cas, elles peuvent entraîner la mort, comme ce fut le cas à Walkerton en Ontario, alors que 7 personnes sont décédées et environ 2500 furent malades en raison d’une contamination du système d’aqueduc municipal par la bactérie E.Coli O157 H7 d’origine fécale.
Dans le cas des algues bleues, on sait que certaines fleurs d’eau peuvent produire des toxines pouvant être très dangereuses pour la santé. Ces toxines peuvent s’attaquer au foie et au système nerveux, et peuvent causer des dermatites et même des tumeurs, dans des cas extrêmes. Malgré le danger que représentent les cyanobactéries, aucun cas n’a encore été rapporté au Québec. Cela ne veut pas dire que les algues bleues ne sont pas à prendre au sérieux, mais peut-être sous un autre angle : « Les cyanobactéries sont un signal qu’il y a un pro-blème environnemental de qualité du milieu, pas un problème de santé publique », expliquait un conférencier lors du dernier Forum national sur les lacs. Le docteur Savard pense que « les cyanobactéries, il ne faut pas que ça nous détourne des microbes qui nous rendent vraiment malades ». Les algues bleues, c’est « un nouveau phénomène », avec lequel « on a perdu une juste perspective », continue-t-il.
État de la rivière du Nord
Tout au long de la rivière du Nord, il y a de fortes concentrations de bactéries d’origine fécale. À Val-Morin, il y a la plage du Lac Raymond, évaluée à dépolluer, où l’eau est de si mauvaise qualité qu’on y aurait déjà observé des excréments qui flottaient, a dit au Journal le directeur général de Val-Morin, monsieur Pierre Delage. Un peu plus en aval, au pont Gagliési, à Piedmont, le ministère de l’Environnement (MDDEP) a observé des niveaux de coliformes fécaux allant jusqu’à 2 200 ufc/100 ml. À Prévost, la Ville, qui fait un suivi régulier de la rivière, des lacs et des ruisseaux, a obtenu, lors de prélèvements effectués les 19 juin et 4 août, des résultats très élevés : au pont Shaw, il y avait respectivement 429 ufc/100 ml et 436 ufc/100 ml et à la marina, 311 ufc/100 ml et 393 ufc/100 ml, ce qui est beaucoup trop pour pratiquer la baignade. À Saint-Jérôme, cet été, les prélèvements ont révélé des concentrations allant de 100 ufc/100 ml à 830 ufc/100 ml. Cet écart dans les concentrations de coliformes montre que la présence de bactéries est fortement influencée par de nombreux facteurs, en premier lieu les aléas du climat.
Pistes de solutions
Que faire pour améliorer la qualité de nos cours d’eau ? Eh bien, une bonne partie de la solution tient au pouvoir des Municipalités. Bonne nouvelle : de nombreuses solutions s’appliquent autant pour les cyanobactéries que pour les micro-organismes d’origine fécale ! Alors, tout d’abord, il est primordial que les municipalités mettent aux normes leurs installations d’épuration et qu’elles visent l’objectif 0 en ce qui concerne les débordements du réseau. Pour ce faire, il faudra séparer les eaux pluviales des eaux sanitaires dans différentes conduites, afin de ne pas rejeter d’eaux usées directement dans les cours d’eau. Ensuite, il faut que les autorités municipales (avec la participation des citoyens) mettent tout en œuvre pour que les installations septiques présentes sur leur territoire soient réglementaires et efficaces. Aussi, il faut éloigner les bétails des cours d’eau et modifier les habitudes des éleveurs qui épandent du lisier liquide et non pas du fumier solide. Il faudrait également réduire les surfaces imperméables (ex. : stationnement) dans les zones urbaines ou, si impossibles, favorisez la rétention d’eau dans ces zones imperméables. En plus, réduire la consommation d’eau, reboiser les berges, sensibiliser les gens, etc. Il n’y a pas une seule solution, mais bien une multitude. Et cela va nécessiter d’importants financements, certes, mais surtout une forte volonté de la part des dirigeants municipaux et une participation active de la part de la population.