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Alexandre Cayla, août 2007 – Le mois dernier, le Journal a voulu en apprendre plus sur le processus de contrôle de la qualité de l’eau de la rivière du Nord ainsi que sur la procédure d’émission de mise en garde lorsque la concentration de coliformes fécaux rend le cours d’eau inutilisable. Lors de cette courte enquête, il est devenu apparent qu’une telle procédure n’existait pas et même si chaque organisation avait une idée claire de ses responsabilités, l’envoi d’avis à la population ne figurait pas dans leurs listes de tâches.
Les trois organismes gouvernementaux contactés —le ministère du Développement durable et des Parcs, le ministère des Affaires municipales et régionales et l’Agence de santé et des services sociaux des Laurentides— ne semblaient pas être préoccupés outre mesure par le manque d’avertissement ou même de procédure de contrôle de la qualité de l’eau. Chaque partie avait ses rôles et responsabilités et s’y restreignait.
Selon ce que nous avions appris, l’Agence de santé publique n’est pas l’organisme gouvernemental qui serait responsable d’avertir la population puisqu’il n’agit que de manière réactive : elle n’émet de mise en garde publique que lorsque des cas de troubles physiques ou de maladies associés à la piètre qualité de l’eau sont déclarés ou lorsque le MDDEP lui en fait la demande expresse. Tant que ni l’une, ni l’autre de ces situations se présente, l’émission d’avis publics leur semble inutile. D’ailleurs, celui-ci nous avait reproché d’avoir contacté la mauvaise personne : c’est bien plus au MDDEP ou au MAMR que nous aurions dû nous adresser.
Une solution incomplète
Trouver l’organisme qui pourra répondre à notre questionnement n’a pas été simple puisque le MAMR et le MDDEP ont une responsabilité partagée dans le dossier de la qualité des eaux. Kamal Boulerouz, employé du MAMR à Montréal, résume très bien le rapport entre les deux organismes gouvernementaux. Le MDDEP évalue la « capacité de support » de la rivière ainsi que les usages qui y ont cours (baignade, canotage, etc.) et établit des objectifs de rejet respectueux de l’environnement. Ensuite, le MAMR en tant qu’expert technique évalue la capacité des stations d’épuration à se conformer à ces objectifs et leur impose des exigences de rejet. Ainsi, si tout fonctionnait à merveille dans le meilleur des mondes, les usages des cours d’eau devraient être garantis malgré la pollution que font les stations d’épuration. Ce qui, à la lumière des derniers résultats, n’est pas le cas.
Ne pouvant être plus à propos, M. Boulerouz apporte quelques nuances. D’abord, en ce qui concer- ne le respect des exigences de rejet: celles-ci sont évaluées en fonction de périodes et non de seuils. Ainsi, les dépassements ne constituent un problème qui si leur fréquence fait en sorte que la moyenne autorisée n’est pas respectée ; quand les hauts sommets sont balancés pas des jour-
nées plus basses, les rejets sont considérés comme conformes. Aussi, comme les valeurs sont mesurées à la bouche de sortie des usines d’épuration, elles ne permettent pas de mesurer la pollution réelle du cours d’eau puisqu’elle ne prend pas en compte plusieurs paramètres, notamment la dilution. Ainsi, les données recueillies par le MAMR ne permettent pas d’avoir des informations suffisamment précises pour émettre des avis publics.
Toutefois, même si celui-ci avait voulu prendre cette responsabilité, il n’aurait pas pu le faire puisque le ministère n’effectue pas un contrôle immédiat sur les rejets des usines d’épuration, seulement a posteriori. «Les usines ont 42 jours pour nous envoyer leurs résultats, ensuite nous on les analyse et vérifie leur conformité». Bref, ils ne les ont pas avant un mois et demi.
Le MDDEP n’est pas plus engagé
Les réponses du Ministère du Développement Durable, n’ont pas servi à rendre les choses plus claires. D’abord, selon la personne mandatée pour répondre à nos questions, le MDDEP n’est qu’un intervenant de seconde ligne qui n’agit dans le dossier de la qualité des eaux que lorsqu’il est sollicité par le MAMR. Il est vrai que celui-ci opère aussi un programme de suivi (réseau-rivière), mais comme il n’y a que 3 stations d’échantillonnages sur l’ensemble de la rivière du Nord et que les échantillons ne sont pris que mensuellement, ces données ne sont pas suffisamment précises pour permettre l’émission d’avis publics.
Mais, alors, à qui revient la responsabilité de tester et d’informer la population de la qualité de l’eau qu’elle utilise ? Sans trop d’hésitation, celui-ci répond que c’est la personne qui donne un accès public à un plan d’eau qui est responsable d’en faire évaluer sa qualité. Toutefois, comme certains organismes sont incapables d’assumer de tels coûts, le MDDEP teste plusieurs plages publiques dans la région à travers son programme Environnement-Plage; la population n’a qu’à utiliser ces lieux et si quelqu’un décide d’aller ailleurs, elle est responsable des risques auxquels il s’expose.
Vous savez, on ne peut pas faire le suivi sur toutes les rivières du Québec, nous on a un programme, si les gens décident d’aller se baigner ailleurs, ils le font à leurs risques [ils] ont une responsabilité en tant que baigneurs : il faut regarder où l’on se baigne et prendre quelques précautions comme regarder l’état de l’eau ».
Que le ministère présente les lieux « recommandés » est une chose, toutefois ne devrait-il pas avertir la population que le reste des plans d’eaux est dangereux ? Informer les gens de leur responsabilité ne devrait-il pas faire partie des tâches du ministère ? Face à ces questions, notre interlocuteur reste évasif. «Vous savez, les choses ne se font pas en criant ciseau, le Québec est grand et il y a plusieurs autres problèmes à régler, on ne peut pas tout axer en fonction de chaque cours d’eau »
Alors, doit-on comprendre que la Rivière du Nord est un cas isolé ? « Non, pas du tout, d’autres régions rencontrent des problèmes similaires ».
Alors, qu’attendent-ils donc pour agir et informer la population s’il ne s’agit pas que d’un « simple » problème régional ?… Pas de réponse.