Le curé Labelle, prêtre colonisateur

Richard Lagrange est historien. Professeur d’histoire au Cegep de Saint-Jérôme à Mont-Laurier et au Cegep Édouard-Montpetit à Longueuil. Auteur notamment des monographies sur les paroisses de la Vallée de la Rouge et chercheur principal sur l’Histoire des Laurentides et co-auteur d’une Bibliographie sur les Laurentides. – Photo courtoisie

Avec l’historien Richard Lagrange

Lise PinardLa Société d’histoire et de généalogie des Pays-d’en-Haut a convoqué ses membres, ce 30 novembre dernier au Chalet Pauline-Vanier de Saint-Sauveur, pour une conférence dédiée au parcours d’Antoine Labelle, dit le curé Labelle, figure marquante de l’histoire du nord du Québec de 1833 à 1891.

C’est par son éloquence et le rendu du communicateur pédagogue que l’historien, a capté l’attention, pendant plus de deux heures sans intermission des 65 personnes réunies, et partagé ses connaissances et son admiration envers ce grand bâtisseur qu’a été le curé Labelle. Tout était réglé comme du papier à musique : dates, faits, personnes qui l’entouraient, ajoutant ses commentaires sur les témoins de cette aventure, tout en décrivant le rôle de chacun. Monsieur Lagrange nous a donc livré un compte-rendu de l’héritage le plus important que nous a laissé le curé Labelle : le « projet » de développement du nord du Québec.

Depuis la maison familiale à Sainte-Rose, Antoine Labelle a compris très jeune que l’étendue et les richesses du nord du Québec étaient un point tournant de l’avenir de la nation. Les études terminées et la vie ecclésiastique prenant son envol, il décide de se rendre dans les « vieux pays » à titre exploratoire avec pour objectif le devenir du Québec. Sa prestance, son assurance et ses talents d’orateur lui permettent de se faire une place dans les milieux politiques, des affaires et des notables principalement en France et en Italie, confiant que l’expérience servirait son « projet ».

Le « projet » était d’abord la colonisation de la vallée de l’Outaouais qu’il souhaitait étendre depuis la rivière Rouge jusqu’au Manitoba. De retour au Québec ses priorités favorisaient le bien-être des citoyens. Fervent défenseur de la culture et de l’éducation, il parcourt de fond en comble tous les cantons pour encourager les colonisateurs et les familles qui faisaient face à des conditions de vie souvent difficiles, leur assurant un avenir prometteur. Que ce soit au niveau international, national ou provincial, le Curé Labelle est respecté par le clergé, les gouvernements, le milieu des affaires, les professionnels, il a donc la voix pour répondre aux besoins des citoyens. Il s’implique dans la conquête économique qui ouvre la porte à l’exploitation des richesses : minerai, foresterie, agriculture, commerce, puis le tourisme.

Le curé Labelle décrit par les émissions radiophoniques ou télés a certainement contribué à nous présenter un personnage sympathique et près de la vie des défricheurs, mais c’était aussi un passionné par tout ce qui pouvait influencer l’être humain : le monde, la science et surtout l’interaction avec les différentes cultures. Visionnaire, il a participé à la mise en place du p’tit train du nord qui a contribué pour une large part au développement de l’ère industrielle, avec l’ajout d’un système routier élémentaire, mais important, qui traversait les paroisses devenues fonctionnelles.

Chaque participant est reparti avec une nouvelle image de ce bâtisseur qui a tant apporté au Québec en si peu d’années. La mémoire est une faculté qui oublie, mais heureusement que les historiens sont là pour nous rappeler d’où nous venons, pour mieux savoir où l’on s’en va ! Le curé Labelle fait partie des bâtisseurs du Québec et mieux les connaître cultive l’ingrédient nécessaire au sentiment d’appartenance.

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