Conservation Laurentides 

Rendez-vous Conservation 2024 – photo: Valérie Lépine
Valérie Lépine
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La 10e édition des Rendez-vous

Valérie Lépine avec la collaboration de Laurent Besner – La 10e édition des Rendez-vous Conservation Laurentides, organisés par l’organisme Éco-Corridors laurentiens, a eu lieu le 13 novembre dernier à Saint-Jérôme. Quelque 140 personnes issues du milieu de la conservation et du monde municipal s’y étaient rendues.

Ces Rendez-vous sont toujours une belle occasion de s’informer sur les projets de conservation qui ont cours dans les Laurentides. Cette année, les conférences portaient surtout sur les projets et les solutions pour protéger la biodiversité. Voici un résumé de six des sept présentations offertes durant la journée.

OGAT et APUD

Chantal Giroux, conseillère en aménagement du territoire au ministère des Affaires municipales et de l’Habitation, est venue présenter les nouvelles Orientations gouvernementales en aménagement du territoire (OGAT)1 qui doivent être appliquées par les différentes MRC. Les dernières OGAT dataient de 1994. Elles ont donc été entièrement revues pour tenir compte des changements climatiques, de la chute de la biodiversité et des nombreux conflits d’usages en terres publiques. 

Le chercheur postdoctoral Denis Blouin a, quant à lui, illustré les bénéfices des aires protégées d’utilisation durable (APUD)2 qui visent la protection des écosystèmes, des habitats et des valeurs culturelles qui leur sont associées. Le chercheur a souligné les avantages de la protection des aires protégées urbanisées ou partiellement habitées en insistant sur la valeur des corridors écologiques dans ces milieux et celle de la canopée.

Bandes riveraines agroforestières

La conférence portant sur les bandes riveraines agroforestières a mis en lumière l’importance de rétablir des bandes riveraines le long des cours d’eau qui sillonnent les terres agricoles des Basses-Laurentides. L’utilisation de fertilisants et de pesticides a grandement pollué des cours d’eau de cette région. Les remblais et l’absence de haies ou de forêts ont aussi laissé ces terres très vulnérables aux crues soudaines, aux sécheresses, à l’érosion et aux insectes ravageurs. 

Julien Fortier, chargé de projets chez Éco-Corridors laurentiens, a expliqué comment les bandes riveraines étaient essentielles pour assainir les cours d’eau et mitiger les effets des changements climatiques. Il est fascinant de constater l’étendue des services écologiques que rendent les végétaux qui composent les bandes riveraines. En voici quelques exemples : ils captent le carbone (les arbres peuvent ainsi capter jusqu’à 100 tonnes de carbone par hectare, ce qui équivaut au carbone relâché par 80 automobiles par an), augmentent la biodiversité du milieu, diminuent les espèces animales nuisibles (par l’augmentation du nombre de prédateurs), filtrent les pesticides et les fertilisants, diminuent les sédiments qui peuvent s’accumuler dans un cours d’eau, favorisent la présence des insectes pollinisateurs, ont un effet brise-vent important, sont des refuges pour le bétail et peuvent devenir des corridors fauniques. Sans oublier que leurs feuilles nourrissent les invertébrés des cours d’eau et leurs racines stabilisent les berges.

Corridor forestier du Grand Coteau (présenté par Pascal Dubé, Service de l’environnement de Saint-Jérôme). – Un grand projet de préservation est en cours dans les Basses-Laurentides : il s’agit du Corridor forestier du Grand Coteau. Ce projet est né de la volonté de divers employés municipaux de protéger les milieux naturels qui composent un territoire de 20 337 hectares situé entre Mirabel et l’Assomption et bordé au sud par la rivière des Mille-Îles et au nord par le plateau laurentien. Ce corridor assure un lien entre divers milieux naturels qui sont constitués d’« une multitude de milieux humides, de communautés végétales et de peuplements forestiers à intérêt écologique très élevé »3. Ce corridor écologique favorise entre autres les déplacements de la faune qui a besoin d’un territoire non morcelé pour se reproduire, se nourrir et s’abriter. Les forêts du Corridor rendent par ailleurs plusieurs services écologiques comme la production d’îlots de fraîcheur, la régulation des crues et l’amélioration de la qualité de l’eau et de l’air. Pour toutes ces raisons, plusieurs municipalités et MRC de cette région collaborent aujourd’hui à la réalisation d’un plan d’action qui vise à contrer la fragmentation et la disparition de ces habitats.

Impact des activités récréatives sur la faune (présenté par Marc-André Villard, SEPAQ et Jessica Bao, étudiante à l’UQAR). – Des études sont actuellement en cours pour évaluer l’impact qu’ont les sentiers et les randonneurs sur le succès reproducteur de la faune et sur son comportement en général. Les résultats préliminaires tendent à montrer que le taux de fréquentation des sentiers par les randonneurs a un impact sur le succès reproducteur de certains oiseaux (l’étude de M. Villard portait sur la grive des bois et la chouette rayée). En gros, on a constaté que plus il y a de monde, plus le succès reproducteur diminue. Les activités récréatives (randonnée, vélo de montagne) semblent aussi avoir un impact sur le comportement des grands mammifères. Ainsi, les loups gris et les coyotes s’éloignent des sentiers tandis que les chevreuils s’en rapprochent. Les ours tendent quant à eux à adopter des habitudes de vie nocturnes. En outre, ces études tendent à montrer que la présence de chiens a un effet perturbateur sur le comportement des animaux. 

Pouvoir des municipalités et conservation des milieux naturels

À la suite de la COP28 de novembre 2023, le Québec s’est engagé à protéger 30 % de son territoire d’ici 2030 (appelé objectif 30×30). Pourquoi 30 % ? Parce que 30 % correspond à la superficie minimale à protéger pour maintenir la biodiversité d’une zone donnée. 

Dans ce contexte, les Municipalités ont un rôle prépondérant à jouer dans l’atteinte de l’objectif 30×30 puisqu’elles ont le pouvoir de réglementer en faveur de la conservation des milieux naturels. Me Jean-François Girard, avocat spécialisé en droit de l’environnement, a démontré comment le cadre législatif actuel soutient les municipalités dans leurs velléités de conservation. Il a expliqué que les Villes ont le pouvoir de le faire grâce aux nouvelles OGAT et au cadre législatif qui se positionne dorénavant en faveur de la protection des milieux naturels depuis l’ajout de l’article 245 à la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU) (projet de loi 39). Avec ce changement législatif, les municipalités peuvent continuer à adopter une réglementation qui favorise la protection des milieux naturels sans craindre de se faire poursuivre pour expropriation déguisée4

Exposition de photos

La photo piranga écarlate a été prise par Jean-Luc Charbonneau

L’exposition de photos mise sur pied par le CRPF est un franc succès ! Plus de 50 personnes ont participé au vernissage le 28 novembre dernier et quelques photos ont déjà été vendues. Pour rappel, l’exposition comprend 25 images d’animaux et de plantes des Laurentides et sont l’œuvre des photographes Jean-Luc Charbonneau et Germain Lachance. L’exposition a lieu à la salle multifonctionnelle de la bibliothèque de Saint-Hippolyte et se termine le 13 janvier 2025.

1. OGAT 2024

2. Aires protégées d’utilisation durable (APUD) 

3. Corridor forestier du Grand Coteau

4. Pour plus d’éclaircissements sur les modifications législatives de la LAU

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