La foresterie au service de l’environnement 

Foresterie - journal des citoyensÀ gauche, le biologiste en faune aquatique et Charles Gélinas, ingénieur forestier, conférenciers, posent en compagnie de Maxime Bélanger, agent de liaison et John Dalzell, président de l’ABVLacs – Photo : Jacinthe Laliberté
Jacinthe Laliberté
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Conférence annuelle de l’ABVLacs

Jacinthe Laliberté – La protection des forêts ou le développement des territoires? Les Municipalités des Laurentides font face, présentement, à ce dilemme. Un choix difficile dans une ère où les citadins désirent venir s’établir dans un havre de paix entouré de forêts. Tel fut l’objet de la conférence de deux spécialistes dans le cadre de la conférence annuelle de l’ABVlacs qui s’est déroulée le 4 juin dernier.

Lors de la présentation, les deux conférenciers, Charles Gélinas, ingénieur forestier en aménagement de forêt, et Antoine Sénéchal, biologiste en faune aquatique, ont démontré qu’il existe véritablement une corrélation entre la préservation de la forêt et l’impact sur les cours d’eau. 

La protection ou le développement?

La pandémie, cette mal-aimée, a provoqué, comme on le sait, un boom immobilier (vente de maisons et de terrains) dont l’effervescence a permis, à certaines municipalités, de bénéficier d’un apport financier imprévu considérable. 

Conséquemment, deux enjeux ont été et sont encore plus que jamais sur toutes les tables de discussions des élus municipaux : développement ou protection du territoire. Pour certaines, le temps est venu d’agir. Telles sont les Municipalités de Sainte-Anne-des-Lacs et de Morin-Heights qui ont adopté un « règlement de contrôle intérimaire ». « Un contrôle intérimaire est un temps de réflexion que la Municipalité a voulu se donner dans une perspective de planification. La faille de notre réglementation actuelle est encore plus réelle depuis l’engouement des coupes forestières en milieu privé. Comme il n’y a pas de règlement régional à la MRC des Pays-d’en-Haut pour contrôler la coupe, cela revient à chacune des municipalités d’avoir leur propre réglementation », d’expliquer Mathieu Langlois, directeur du service de l’Environnement de cette Municipalité.

Un changement de mentalité 

Selon Charles Gélinas, en 35 ans, le développement s’est fait à une vitesse fulgurante, et ce au détriment de la protection. Conséquence : près de 30 % du couvert forestier a disparu. « Pour voir où va l’avenir, il faut regarder notre passé », a lancé Charles Gélinas. 

Peu de forêts centenaires se retrouvent sur le territoire des Laurentides. Son historique de terres agricoles, de construction d’un chemin de fer tant espéré par le Curé Labelle, de l’engouement pour le ski et finalement, de l’essor immobilier et touristique réduit ledit territoire à des forêts fragiles et sensibles aux catastrophes naturelles.

Ce dernier parle des changements importants constatés, depuis les dernières années, chez les nouveaux acheteurs de terres forestières. Ils ont la volonté de protéger leurs nouvelles acquisitions contrairement aux acheteurs spéculatifs. 

La coupe sélective, un moyen approprié à la foresterie

La foresterie a, selon Charles Gélinas, mauvaise presse, car elle est, plus souvent, associée à des exploitants plutôt qu’à des aménagistes et des écologistes. Dans les faits, la foresterie est une science de gestion, de conservation et d’aménagement, ce qui est loin de la coupe à blanc.

Pour ces deux aménagistes forestiers, la coupe sélective permettra à la forêt de se régénérer plus rapidement grâce à la coupe des arbres malades ou en fin de vie au profit des jeunes arbres. Protéger les beaux arbres sains et forts est la priorité de la coupe sélective. Ainsi donc, la forêt se renouvellera après une quinzaine d’années et deviendra résiliente aux changements climatiques.

Mathieu Langlois considère ce type de coupe comme une bonne solution puisqu’elle ne perturbe que temporairement les habitats fauniques. Un bon casse-tête, car ce ne sont pas toutes les terres qui se prêtent à la coupe sélective. Il explique quelques contraintes : « Certains terrains ont des pentes de 30 % et plus ainsi que des milieux humides impossibles à contourner ».

L’impact sur la santé des lacs

Le biologiste Antoine Sénéchal est venu expliquer les impacts qu’ont le déboisement des rives et, conséquemment, leur érosion, les fosses septiques et les champs d’épuration vieillissants qui déversent des contaminants dans les lacs. Tous ces facteurs ont un impact direct sur la perte de la biodiversité des bassins versants et, par conséquent, des lacs. 

Les arbres ont un rôle d’importance pour contrer ces diverses problématiques. Ici sont ciblés les arbres ceinturant un plan d’eau autant que ceux qui boisent un bassin versant. Ils contribuent à la rétention du sol ainsi qu’à sa filtration. Leurs racines forment, également, une barrière contre les herbicides et les engrais. 

Que voulons-nous ?

« Veut-on protéger le capital naturel sous l’égide du développement durable ? La réglementation doit refléter cet objectif de protection à Sainte-Anne-des-Lacs. La foresterie est une bonne solution puisque l’ingénierie forestière a évolué vers des approches moins intensives », de conclure Mathieu Langlois. 

Les deux conférenciers ont lancé ces dernières questions qui portent à réflexion : « Sainte-Anne-des-Lacs est-elle, déjà, une extension de Montréal ou veut-elle rester un milieu plus rural ? ».

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