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J’ai peur qu’il n’y ait plus d’Autre
Sandra Friedrich – Je ne vous le cache pas, je suis inquiet. Ma gardienne heureusement ne se tient pas à 2 mètres de distance sociale de moi, toutefois elle garde avec précaution ses distances de ses semblables. Mais que va devenir le lien à 2 mètres de distance ?
Je me questionne. Que va devenir le lien ? Car le lien c’est aussi du toucher. Le lien est composé d’attachement. Mais pour s’attacher, faut sentir, faut caresser, faut ressentir, toucher la peau. La petite bête en dedans de l’humain a besoin de contacts physiques sans quoi elle périclite. Bref, comment développer des liens sans toucher ? Sans être touché ?
Tous les bidules, écrans, télécommandes, améliorent peut-être la communication, mais assurément altèrent les relations humaines. Quand on communique par écran ou par SMS, comme tout le monde le fait depuis deux mois, la relation humaine se dégrade, elle s’abîme. La preuve : quand ma gardienne est là-dessus, j’ai beau miauler pour de l’attention, elle fait semblant de m’écouter. Alors vous savez quoi, j’ai trouvé un truc imparable : je me couche sur ses bras. Là, je l’ai pour moi tout seul.
Boris Cyrulnik dit qu’après chaque catastrophe, il y a une explosion de relations, d’associations, de lieux de dialogue. Selon lui, ça va développer l’attachement. C’est toujours le même principe : quand l’environnement est dangereux, la famille redevient le havre de la protection.
Je me demande comment celui-ci sera authentifiable sans le toucher ? Swami Prajnanpad disait en substance : « Vous ne vivez pas dans LE monde, vous vivez dans votre monde ». C’était déjà vrai avant la catastrophe où chacun imposait sa vision de l’existence à l’autre et vivait figé dans des croyances et certitudes, véritables barreaux de vos prisons mentales. Ça l’est d’autant plus maintenant que le gouvernement, notre pays, le Premier Ministre nous enjoignent de ne plus vivre le monde, donc de ne plus se toucher, de vivre dans nos mondes, emprisonnés.
Certes, vous allez me dire vous aviez déjà de moins en moins de contacts humains avant l’épidémie. On est passé à un poil, nous autres félins, de ne plus être caressés du tout. Les informations découlant des recherches vétérinaires et des études sur ce virus indiquaient de prendre ses précautions avec les animaux de compagnie. Fiou ! Heureusement que ma gardienne nourrit sa conscience d’informations. Elle ne m’a pas abandonné, contrairement à mes confrères et consœurs européens abandonnés à cause de la peur et l’ignorance.
Cette crise nous montre que nous ne sommes pas séparés les uns des autres, même lorsque nous vivons séparément. Je prie le grand dieu des chats pour que les humains réapprennent à s’aimer et de faire preuve de compassion.