L’RC Jazz

Gisèle Bart
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Pour faire vivre la musique

Gisèle Bart – À plusieurs reprises à Diffusions Amal’Gamme, différentes formations dirigées par Raoul Cyr ont ouvert la nouvelle année. Cette fois, c’est la saison 2017-2018 qu’il ouvrait avec brio avec son nouveau « band » où il avait réuni neuf de ses anciens élèves et amis. Étaient regroupés Louis Plouffe au sax alto, Pascal Tremblay au sax ténor, Jessyca Charbonneau au sax baryton, Maxime St-Pierre et Antoine Martin aux trompettes, David Laurin au piano. À la basse, Norman Lachapelle, à la batterie, Vincent P. Ravary. La versatile Jessica Vigneault s’était jointe à eux en tant que vibraphoniste et chanteuse. Enfin, lui-même, Raoul Cyr, à la direction et au trombone.

À l’instar des couleurs qui allaient envahir nos arbres quelques jours plus tard, ce fut une soirée empreinte de beauté, d’exubérance et de brillance. Le tout recouvert d’une fine feutrine perpétrée par le trombone, la basse et les saxos lorsque ces derniers, les flèches ensoleillées des trompettes ou le cristallin du piano et du vibraphone ne jouent pas en solo, ce qui donne le son apaisant si particulier de ces « bands » comme ces paysages recouverts d’un léger brouillard.

M. Raoul Cyr qui ne tarit jamais de projets pour « faire vivre la musique » avait concocté ce nouveau concept où plus de douze « standards » culte du jazz allaient nous être interprétés, la plupart chantés par Jessica. Des airs magnifiquement arrangés par le mythique Stan Kenton, un arrangeur du XXe siècle « trop rarement joué ». Des arrangements aux innombrables et efficaces demi-tons qui donnent aux pièces des sonorités inédites. Tous arrangements qui laissent amplement sonner chacun son tour chaque instrument, le tout suivi d’amalgames, un « blend » qui frôle la perfection.

Comme à l’accoutumée, ce RC Jazz a su créer une ambiance goûtée avec délectation par une assistance électrisée. La voix de Jessica, belle, puissante et grave, saupoudrait un poivré des plus pertinents tandis que son image souriante et sa robe garnie de strass ajoutaient une sémillante touche « glamour » à l’ensemble. À Fly me to the Moon, le vibraphone de cette dernière jouera le rôle d’étoiles. À Caravan, une « tempête » nous avait prévenus Raoul Cyr, l’excellent et omniprésent claviériste prendra une plus grande importance encore, avec cette fois la tonalité de l’orgue dans un joli dialogue avec le vibraphone. Nous bénéficierons d’un solo des plus costauds de la batterie après quoi tous les instruments se mêleront les uns aux autres en une véritable « tempête » effectivement. Blottie entre ces deux derniers morceaux, une pièce langoureuse, Round Midnight, avec sourdine à la trompette et résonance extrême du vibraphone saura nous envoûter. Suivra une chanson que Jessica « affectionne tout particulièrement », You must beleive in Spring. Piano-voix pour débuter, progressive intrusion de la batterie de par le sensuel balai sur les cymbales, intrusion à son tour du vibraphone. Introduite par ce même vibraphone avec résonance prolongée, solo de la basse, Autumn Leaves sera accueillie par l’habituel murmure de satisfaction de la part de l’assistance, immanquablement provoqué par cette pièce.

Au rappel, Pascal Tremblay nous assurera que nous serons « choyés » par une toute première lecture de leur part du morceau choisi, Mercy! Mercy! Mercy! de Joe Zawinul, Raoul Cyr s’y accordera une belle place. Chaque musicien y brillera à son tour.

Parvenu à la fin du programme, je me suis rendu compte que le sourire qui s’était installé sur mes lèvres dès les premiers accords du concert ne les avait pas quittées de toute l’heure et demie. Qui plus est, j’ai pu constater que mon entourage était dans le même état de béatitude que moi. Une fois de plus, le perfectionniste Raoul Cyr et ses condisciples venaient de nous démontrer que du bon jazz, c’est de la grande musique.

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