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Sur le chemin de Compostelle
Danielle Larocque – Me voilà de retour, après un périple de 35 jours de marche en Europe. Quelle expérience que la route française du chemin de Compostelle, qu’on a baptisé le « chemin des étoiles » (campus stellae, ou champ de l’étoile); un trajet de 750 km allant du Puy-en-Velay jusqu’à Saint-Jean-Pied-de Port.
Contrairement à ce qu’on peut croire, ce n’est pas une activité pour sportifs aguerris : une bonne préparation physique et l’équipement adéquat sont les exigences de base. J’y ai rencontré des randonneurs de tous âges et de toutes conditions physiques.
Une des devises là-bas : faire son propre chemin, à son propre rythme. J’ai donc été sage, j’étais bien préparée. J’ai commencé par marcher de petites distances, en deçà de mes capacités. Mon sac à dos avait un poids raisonnable à transporter, très peu de superflus pour les «au cas où»: à peine 7 kg plus le poids des gourdes d’eau du jour. Ainsi mes pieds ont pu suppor- ter l’épreuve et suivre la cadence jusqu’au bout. Ce qui parfois n’était pas toujours évident, car malgré tout, mes pieds ont chauffé, mes jambes ont ressenti la fatigue de l’ef- fort répétitif.
Sur le chemin, j’ai fait la rencontre de personnes qui avaient des ampoules sanguinolentes ou des tendinites récalcitrantes. C’est fou comme une si petite blessure peut devenir très handicapante. Ces épreuves, d’autres marcheurs m’ont confirmé l’importance d’être vraiment à l’écoute de son corps et de le bichonner, c’est-à-dire le reposer et le soigner. Pour aller si loin, il m’a fallu du repos, de la récupération au quotidien, de l’eau en quantité même avant d’avoir la sensation de soif, de la crème lubrifiante pour les pieds avant et après l’effort, des massages et quelques trempages de pieds… et de l’écoute encore et encore.
De nature réactive et dynamique, j’ai dû ralentir et apprendre à patienter, mon conjoint pourrait vous en parler. Je me suis modérée plusieurs fois en cours de route et j’ai eu du plaisir à être lente; alors ma perception du temps a changé. Je suis passée du projet à accomplir au chemin du jour à vivre. Qui l’eut cru ? Cela m’a permis d’observer davantage, d’écouter davantage, d’apprécier davantage ce que je vivais, de me sortir davantage de mes inquiétudes.
« Être » plutôt que simplement « Faire » ! Voilà mon plus beau cadeau de ce chemin.
Je constate en ce jour que ma vision de l’avenir s’est modifiée; en fait c’est plus précisément de mon attitude face à l’avenir dont je veux parler : je ne ressens plus le besoin de courir après des résultats pour compenser une quelconque insécurité; il n’y a qu’à vivre chaque pas, il n’y a qu’à être dans son pas. C’est énergisant.
La route des étoiles, c’est une route qui mène un peu plus vers soi… un pas à la fois. Du moins ce fut là ma route des étoiles.
Maintenant reste à poursuivre cette route des étoiles dans ma réalité de citoyenne prévotoise.